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Traverse projette à l’UGC
à des magazines de presse féminine. Belles endormies filme des corps et des visages aux yeux fermés,
interroge leur silence et leur insuffle une nouvelle vie. Par le détournement des images, nous entrons dans
le cauchemar d’une jeune fille de papier, dans ses visions aux antipodes de l’univers de rêve vendu sur les
affiches publicitaires.
Pascale Sequer, Sylvestre, 8min
Une jeune femme rêveuse, Sylvestre, plongée dans
le labyrinthe de ses propres pensées, déambule dans les
décors d’une ville thermale des Vosges.
La ville semble assoupie, dissimulée sous la forêt de
sapins. Mis à part les curistes, peu de gens dans les rues.
Dressées sur les hauteurs, de belles demeures sont clo-
ses, certaines oubliées depuis des années, se délitent
doucement. L’atmosphère particulière des lieux influence
fortement l’état d’esprit de la jeune femme.
Le projet est né pendant un séjour à Plombières-Les-Bains. La ville m’est apparue comme un
monde à l’intérieur d’un monde, hors limites d’un monde familier. Les thermes, les demeures élégantes
et mystérieuses de style napoléonien, les escaliers moussus, l’eau et la forêt omniprésentes, donnent à
la ville une atmosphère particulière, favorable aux songes. Ces sensations oniriques furent le point de
départ du scénario, Plombières-Les-Bains, le cadre idéal pour tourner le film et entraîner le spectateur
dans une poésie de l’étrange.
C’est un film d’imprégnation, un conte initiatique, une errance solitaire dans une ville à la carto-
graphie labyrinthique. Le cheminement de Sylvestre évoque les méandres de sa pensée.
L’histoire est située dans l’intemporel. Le temps n’a pas d’objectivité, tout est réduit, faussé, allongé. Les
durées sont perçues différemment, les images se superposent ou se juxtaposent comme dans un rêve. La
constitution du sens se fait non seulement par la succession des images mais aussi par leur récurrence,
leur apparition/disparition faisant déborder un registre sur l’autre (réalité, imaginaire) par porosité au point
d’en annihiler les limites.
Le film est composé d’une suite de photographies noir et blanc aux contours diffus qui participent
à l’émergence d’images suggestives, improbables, de traces fugitives. Ces images traduisent « la matiè-
re affective », l’espace confus de l’inconscient de Sylvestre. Certains passages sont enregistrés
chronophotographiquement, les images ainsi obtenues restituent le réel étendu dans sa durée et
dans son épaisseur. Certaines images et un instant vidéo sont en couleur et ancrent Sylvestre dans
une réalité plus documentaire. Juxtaposer ces deux modalités d’inscription du réel, le temps photo-
graphique et le temps vidéo, provoquent l’émergence d’une narration évanescente.
Le montage du film est structuré géométriquement et rythmiquement à la manière d’un
labyrinthe, Sylvestre repasse par les mêmes lieux et les mêmes étapes (escaliers, tunnels et forêt),
les lignes verticales des troncs des arbres et les lignes horizontales des escaliers participant de
manière importante à l’effet d’enfermement. Ce récit labyrinthique implique une vision cyclique de
l’histoire, tout revient éternellement …
Le travail sonore rejoint le travail visuel dans sa dimension abstraite. Tout ce qui produit du son
dans l’environnement de Sylvestre a été prélevé, jusqu’aux bribes de conversation lointaine, traces
persistantes de la présence rémanente d’anciens curistes. Cette matière sonore est retravaillée, cour-
bée, agencée afin de révéler les fréquences résonnantes des lieux.
Pascale Séquer
48 Cinéma expérimental, art vidéo, monobandes - Processus