Page 54 - catalogue 2017
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Projections 4. Cinémathèque de Toulouse



rituels par l’animation : un gros phylactère accroché au crâne comme une tumeur extérieure, le pied s’approchant,
reculant de l’escalier hâtivement dessiné, le lavabo où les mains sont lavées et relavées.
En reprise incantatoire quoique toujours en tonalité calme, la demande d’efacement des images négatives, la
recherche d’images positives, pour procéder à l’efacement de la maladie et du malaise vital obsédant, alors que
répéter pour annuler s’apparente aux symptômes : PROCEDERE double indissociablement le processus de la
maladie et celui pour s’en défaire.
Simone Dompeyre
Jayne WILSON, As You See, 7min50 (Angl.)

« Nos sens peuvent être dignes de confance,
mais peuvent aussi être facilement dupés. »

Quelques mots d’introduction au travail de Jayne Wilson à prendre
comme un hommage aux débuts de la télévision et qui nous
entraîne dans un voyage panoramique à travers les espaces des
405 lignes standard de la télévision analogique. Dans le champ des
points grisâtres puis des lignes verticales et horizontales qui s’y
déplacent rapidement, parfois abruptement interrompues par des
fragments de flms noir et blanc, familiers mais qui disparaissent
avant d’avoir pu être reconnus. Des cow-boys pointent leur arme en efet de hors cadre, un court moment
d’une course de chevaux comme un hommage, cette fois-ci, à Edward Muybridge, l’un des pionniers des images
en mouvement qui, en décomposant le mouvement a prouvé que nous voyons du mouvement là où il n’y en a pas,
révélant ainsi la tromperie de l’œil et consécutivement les taches aveugles de la conscience.

Le mouvement des points et des lignes correspond aux motifs répétitifs de la bande son, sans que se sache
clairement si c’est le piano qui dirige les images ou si c’est le mouvement des images qui donne le rythme aux
doigts du musicien.
Le spectateur ressent un état constant de surcharge visuelle mais, simultanément, il baigne dans une sorte
d’euphorie graphique. Les motifs en ficker et les scènes n’auraient-ils pas, cependant, une fonction de rappel de
l’état d’absorption du téléspectateur lambda, qui, bière à la main enfoncé dans son canapé, perçoit à peine plus
qu’un fux constant d’images, occasionnellement interrompu par des fashes de reconnaissance d’une scène
quand elle ressemble à une de ses expériences personnelles ? Nous ramènent-ils à la fascination des débuts de
l’image en mouvement ou devons-nous en conclure que la perception réelle requiert bien plus qu’une simple vision?


Sylvia Winkler
5. Cinéma ABC



Marie-Paule BILGER, Between, 3min43 (Fr.)

Sans vocifération, mais dans une retenue élégante, Marie-Paule
Bilger refuse l’indiférence devant le monde comme il va. La
sonorité même de Between fssure l’image trop plane et lancée
seule, elle oblige à entrer, à saisir, à comprendre. Que ce soit
d’abord sur la pointe des pieds - en retour sur sa propre histoire
et sans se contenter du souvenir - c’est en acte, qu’elle marche en
chaussons de danse sur ces images à refuser, images et textes de
crimes constants contre le vif, images qu’elle a d’abord tissées en
un geste plastique qu’elle poursuit en une implication performative.
Elle dit : « J’ai dansé, j’ai arrêté de danser, j’ai repris les pointes et
je danse sur la guerre. Sur un seul écran, neuf vidéos fonctionnent
plus ou moins en même temps laissant circuler le regard.
M’intéressant à la mémoire de la guerre 39/45, je fais un parallèle avec les confits actuels. Je découvre dans
la maison familiale un cahier datant de 1941 dans lequel quelqu’un, je ne sais qui, découpe des images de guerre,
les colle et les organise.
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