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Mael LE GOLVAN
Paysages Hyperboréens, tentative d’extinction du jour
Paysages Hyperboréens est un travail photographique que j’ai effectué en 2014, en Norvège, en Suède
et en Finlande au-delà du cercle polaire arctique à 66°nord de latitude.
Il s’agit pour moi de travailler avec la réalité de ce monde à ce moment donné : durant l’été, cet en-
droit, vit dans la période nommée jour polaire, il y fait jour de manière permanente. Si l’on se réfère à la mythologie
grecque, c’est de là que vient le nom « hyperboréen » : l’hyperborée est la résidence des dieux, une sorte de paradis
lointain, pensé par les Grecs comme un lieu où il fait jour de manière permanente. C’est le cas durant l’été alors
qu’à l’inverse pendant l’hiver, c’est la nuit qui devient permanente. Cependant, en considérant des éléments liés à un
autre texte, en l’occurrence, une épopée finlandaise, le Kalevala *, toute cette partie du nord est, au contraire, perçue
par ceux qui en sont proches comme une zone dans laquelle il ne faut pas aller car c’est une zone froide, sombre,
douloureuse et invivable durant l’hiver et de ce fait considérée comme un enfer. L’idée de ce projet était d’intervenir
en utilisant ces deux sources, en considérant le caractère hyperboréen du jour permanent tout en optant pour une
position contrariante. J’ai donc produit des images nocturnes par la technique dite « nuit américaine » dont le proces-
sus implique de sous-exposer complètement la prise de vue pour produire une sensation nocturne.
Visuellement les paysages sont traversés par un homme qui s’y balade toujours avec ce que l’on peut
prendre pour une lampe de poche. Pour créer cet effet à l’aide de la sous-exposition, j’ai dû travailler avec une lampe
de 1000 watts, un halogène puissant alimenté par une batterie de voiture de 20 kg que je transportais dans mon sac
à dos et qui avait une autonomie de moins de dix minutes. Ce détail technique révèle l’absurdité de la démarche. Du
fait du réglage de l’appareil, cette lampe éblouissante est réduite au halo d’une petite lampe de poche et le paysage
diurne devient nocturne.
ESPACE CROIX-BARAGNON / GALERIE JEAN SÉGALAT DECAZEVILLE
PHOTOGRAPHIE 89
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