Page 12 - catalogue 2017
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Édito



TRAVERSE VIDÉO - 20 ÈME ÉDITION - DU 8 AU 31 MARS 2017



Et si la plus grande des qualités pour défendre l’expérimental était la persévérance… voire l’entêtement, si l’on
glisse vers les mots en jeu que Traverse Vidéo aime poursuivre : avoir en tête / dans la pensée mais, aussi, avoir en
premier, toujours. Puisque ce qui la porte est le projet renouvelé de dire que l’expérimental est et son désir de le
partager, Traverse Vidéo vit de cet entêtement amoureux... Traverse Vidéo n’existe que pour cette ouverture au-delà
d’un cercle restreint, n’existe que pour créer des rencontres particulières avec ces formes particulières que tous
peuvent apprécier sinon aimer.
C’est avec cet entêtement décisif porté par la foi qu’on peut y arriver, qu’il a fallu et qu’il faut encore pour que se
connaisse ce grand écart des formes et des oeuvres que Traverse Vidéo a pris forme. D’une simple après-midi
lancée en 1997, mais avec, déjà, et le lien avec l’étranger, la vidéoconférence et Stochklom et un installationniste,
Magnus Wallin, qui accepta cette expérience, avant sa programmation à la biennale de Venise à - si l’on s’en
tient à Toulouse et à ses cinq jours marathoniens suivis de quinze autres d’expositions - à, aujourd’hui, de très
nombreuses oeuvres venues de pays nombreux : Allemagne, Angleterre, Argentine, Arménie, Autriche, Belgique,
Bulgarie, Canada, Chine, Corée du sud, Croatie, Ecosse, Espagne, Etats-Unis, France, Hongrie, Inde, Iran, Italie,
Japon, Koweit, Liban, Norvège, Philippines, Pologne, Portugal, République tchèque, Russie, Suisse, Ukraine...
Cinéma expérimental, art vidéo, performances, photographies et installations.
L’expérimental n’est pourtant pas rentré dans les clous, il le ferait qu’il se perdrait lui-même ; l’expérimental continue
à forcer la limite et les codes, mais direz-vous pour s’en former d’autres. Certes, mais ce sont des codes de
l’atypique et de l’étrange qui se reformulent, sans cesse, dans le plaisir plus ou moins tumultueux, plus ou moins
voluptueux de cette recherche. Sans éroder ce désir, plus vif de ses vingt ans.
L’expérimental se fait se cherchant, sans auditeurs-cibles, sans grille préétablie. Il quête ce qui le déroute lui-même,
l’inouï, le furtif, l’insaisissable parce qu’il est précisément la défnition même de l’art, la recherche.
Art au sens fort puisqu’il inclut diverses formes dont on sait qu’elles sont entrelacées : monobande / installations /
performances. Et si l’art contemporain technologique fait rendre aux machines leurs potentialités pour être art, il lui
faut garder la marque de l’humain qui le crée et celle de ses questionnements : par la voix qui se glisse ou qui hurle
en poésie, le corps qui frémit ou se tord, l’image qui ressemble ou défgure, ainsi le sens se fait en sensation, les
sensations font sens.
Fêter cet anniversaire prouve que l’on peut résister à toutes les injonctions d’aplatissement faites sous prétexte de
faciliter son approche. Le fêter n’implique pas d’exposer des travaux mignons ou inversement facilement provocants
ni des travaux sans aspérités. Le faire implique de donner des pistes, des manières d’approches d’oeuvres qui
résistent à cette approche, qui ne se diluent pas dans le discours autour mais dont la trace se poursuit comme une
rime infnie.
L’expérimental apprend à rester curieux et à garder vif le désir ; il est art parce qu’il est résistance à l’écrasement
au premier degré et par là, il s’avère nécessaire parce qu’irréductible aux nécessités du quotidien. Il s’avère
indispensable pour que demeure de l’humain qui pense, qui rêve, qui veut du dépassement.
Les diverses « thématiques » de ses dix-neuf ans passés s’avèrent, elles, plus des tremplins à confrontation de
diverses manières d’inventer, de créer que des attentes de réponses sclérosantes. Chacune d’elles s’est fondée sur
la polysémie, les pelures de sens ou sur la métaphore active.
2017 : loin du désir d’allonger la littérature sur les vingt ans d’une vie, jugés le plus bel âge ou le pire, la perte de
l’innocence ou le gain de la maturité, le modèle déjà arrêté ou le moment de la pensée utopique, Traverse Vidéo
a préféré parmi ses programmations de ses 19 ans, retrouver des oeuvres pour une confrontation vive avec les
propositions nouvelles revenant à ces interrogations qui l’ont bâtie avec toujours, cet esprit expérimental.
Ce sont ces œuvres qui ont fait Traverse Vidéo et qui font sa vitalité.
L’appel d’œuvres 2017 en a tressé une phrase selon laquelle nos vingt ans invitaient à leur Re-visite - 2007.
En efet, Ça vaut la peine -2010- de revenir au Processus -2014- et Il Faut voir -2012- Le Sens du lieu, lieu du sens
-2015-, ne pas négliger Interstice et porosité -2009-, afn d’inventer Histoire(s) -2013- en Métaphore -2005- de
réféchir à l’État du monde -2006- ou à notre Être / Devenir -2008- sans craindre L’Étrange -2001- ni L’atypique
-2016- selon L’emploi du temps -1999- chercher l’Art Proxime -2011- ou L’Écrit dans le champ -2000- dans
Les Marges du réel -2004-. Ce sera toujours de l’ordre du Palimpseste -2002- avec Le sens, les sens -2003- en
expérimental.
Ainsi venir à Traverse Vidéo prend la fgure du jeu de piste… jeu dédoublé, lui-même en abyme, dont chacun peut
dessiner son parcours.

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