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Prép’art Installations
où se décline la même affection de Lanas en accord musical. Le cheminement s’y
fait à deux ou plutôt à trois tant la marque de l’absent/présent s’immisce tout au
long. La musicienne, Anne Gardey des Bois accompagne au sens de marcher avec,
de fonder le projet comme au sens de musique ; elle suit, épouse le cheminement
par la photo et le film de SLEM en réminiscence à Félix Arnaudin.
En film, le palimpseste se décadre de
son sens strict… il ne se cantonne pas aux
traces des premiers motifs – lettres ou
dessins des écritures en pictogrammes –
grattés pour une réutilisation de la peau
fort onéreuse de cet originel support…
Inversement, sur l’image actuelle, peinte
électroniquement, filmée et retravaillée,
se posent des fragments de lettres,
de journal de cet homme, en lecture
renouvelée. Quant aux deux photographies « autoportrait » et « portrait » de la
jeune fille qu’il ne put épouser – lui, fils de propriétaire, elle, jeune servante – elles
se lisent directement, jouxtées, enfin, l’une à l’autre. Quant aux photographies
de 1850 avec mention de « chambre photographique », ou « plaque gélatine »
« d’orthochromatique » pour 1891, du format, de la localisation, elles gagnent le
premier niveau au-dessus des images actuelles voire l’une opère le renversement
du haut vers le bas de cette technique. Le surcadrage les détache mais la musique
opère le rapprochement de ce passé rêvé – peut-être SLEM est-il plus que sensible
à la nostalgie de Félix Arnaudin.
Plus que l’appellation-film malgré les fils conducteurs des textes, ce serait poème,
ce serait contemplation agie. Le temps est donné au temps ; il est donné au voir. Le
fondu enchaîné est préféré au cut, le volet latéral pousse l’image d’un autre lieu, la
surimpression complexifie le temps du voir. Le suivi des grues au sol recherchant
le reptile parmi les dernières lagunes, volant dans un sens vers l’Afrique suggérée
par l’instrument à cordes d’ailleurs n’a rien du film animalier : ces grues sont celles
qui sont demeurées : l’intertitre témoigne qu’elles ont été vues alors, elles vont et
reviennent.
Le palimpseste s’entend, la bande-son refuse tout folklorisme, elle vibre et revient aux
cris référentiels des animaux, ceux qu’Arnaudin aurait/a pu entendre. Grenouilles,
vent sur les arbres et les frêles molinies, cris des oiseaux, frémissement de la lana.
Le sonore est écho des sensations devant les épis de blé sur fond de nuages, quand
se glisse la maison typique de lattes de bois sur bleu irréel, que celle-ci est éloignée,
le sonore décroît, reprend, s’arrête… reprend sa répétition de légers et brefs chocs.
Les accords plus graves du piano auxquels les sons électroniques d’autres variations
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