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                              Suzan VACHON

                            Les œuvres de Suzan Vachon montent ainsi un film arrêté, ce qu’atteste leur appellation où
                 le devenir, le changement, la temporalité affleurent ; elle les dit « issues d’œuvres phares et de démar-
                 ches exploréennes de la littérature du XXème siècle » choisies alors qu’elle « voulai(s) dé-couvrir mani-
                 festement certains espaces littéraires qui ont veillé sur l’image dans le noir inaugural de toute créa-
                 tion: leviers de désirs nyctalopes.»
                 Chacune fonde un mouvement, un passage alors que l’ensemble forme un germe d’istoria, et alors
                 que l’annonce de ce qui y a lieu comme l’averse de pénombres/ carboniser le blême est poésie, le
                 plus souvent.

                            En effet, l’artiste jamais ne s’abîme en une seule voie, et des bribes d’ailleurs perturbent un trop
                 grand unisson, pour preuve le Qui a peur de Georgia ? digne écho d’un film américain. Passage de l’image
                 souvenir à l’image réveillée, puisque ses composants ont été inventés - comme se nomme le travail de
                 l’archéologue ou du découvreur des grottes ornées - dans la recherche engagée par l’artiste, labo-
                 ratoire de l’archive entamé en 2011-2012 : La patiente solitude des archives.

                            Les sources sont diverses et non pas retenues comme documents ou preuves mais dans un
                 processus parent du footage du cinéma expérimental.

                            Les prélèvements sont le matériau, la chair à travailler. Très intentionnellement, les 25 petits
                 formats rassemblés égrènent un film de la Croix-Rouge en s’emparant de plans descripteurs du
                 maniement de tissu pour des soins aux patients or la série n’apprend rien, elle préfère le flou, la sur-
                 impression des référents tout en analysant, en détachant chacun des mouvements.

                            En distinguant les moments, elle déplace, ce pourquoi ils ont été faits, en prétexte iconique.
                 Ce qui a lieu en chacune et de l’une à l’autre - on ne peut les saisir que groupées - c’est le passage, le
                 déplacement, le refus de la rigidité de l’image, et chacune si proche diffère de l’autre. La série n’est pas
                 plus la reprise que l’emprunt de l’archive n’est répétition.

                            Yvonne Rainer dans Hand movie - 1967/ 1968 - jouait d’un exercice de doigts. Serra filma
                 Hands catching lead en un plan fixe, le gros plan d’un avant-bras tendu dont la main tâchait d’attraper
                 ou de louper, tombant du haut, un morceau de plomb, matériau avec lequel il travaillait alors. Il malaxait
                 ce plomb avant de le lâcher. Eux aussi contredisaient ce désir de réel attendu du film et ou de la photo-
                 graphie. Ils faisaient film du geste…Suzan ramène à cette proposition, les 25 gestes n’ayant plus d’autre

Photographies - Processus                                                                                                         167
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