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                             Vidéos Nomades

                            Quant à la Renaissance, elle divulgua - du moins aux lettrés - ce qui était tenu secret ou réser-
                 vé aux confréries de bâtisseurs, les principes de la Beauté fondée sur la mathématique. Dans sa recher-
                 che esthétique, Léonard de Vinci compare le résultat de ses études anthropométriques aux proportions de
                 Vitruve. Cet architecte romain du premier siècle avant notre ère avait conclu qu’un homme aux bras et jam-
                 bes écartés pouvait être inscrit dans les figures géométriques parfaites du cercle et du carré, le nombril
                 étant au centre. Le dessin de Léonard corrige les erreurs de Vitruve en retenant ses mesures ; pieds et
                 mains ont ainsi la taille appropriée mais les proportions sont transformées.

                            Si Damien Valero jamais ne se défait de ses préoccupations architecturales dans son approche
                 artistique des formes, sa figure féminine s’échappe de carcans. Sur les murs de la ville, le corps s’al-
                 longe, son univers s’agrandit au gré des bâtiments-écrans et de la position du projecteur.

                            Modulor s’y appréhende différemment que sur l’écran canonique de la salle fermée où la tem-
                 poralité prime dans la réception. Comme « vidéo nomade », ici et là, le modèle varie, il est vif… corps
                 gracile féminin, il a fui du carré des mesures. Plus proche des préoccupations d’un Marey ou d’un
                 Muybridge décomposant le mouvement en images successives, il se meut, s’accroupit, se courbe, se tour-
                 ne de trois quarts ou totalement ; il est sujet du mouvement. Il est sujet d’actions même si tirer une corde
                 se fait sans corde. Parfois doublé dans un reflet, parfois doté d’ailes par la surimpression, parfois en Shiva
                 multipliant les bras voire le corps, se marquent les déplacements.

                            Des traces d’arbres mais aussi de constructions des hommes disent la ville jamais loin de végé-
                 tations… l’espace se crée avec les trajets du corps ou parfois un travelling creuse cet espace en quête
                 d’une profondeur du champ.

                            Projeté sur un grand espace, ce laboratoire du tracé loin d’évacuer l’humain, malgré l’évanes-
                 cence de la jeune femme, le provoquait dans son contact avec les maisons réelles.Ce réel de l’habitat
                 allongeait le corps, le faisait se pencher non plus dans l’absolu du modèle mais vers nous, les yeux
                 levés attirés par tant de délicatesse forte.
                 Et parfois impromptue, une couleur des murs s’y adjoignait ; loin de trahir le modèle, elle le ralliait à la
                 ville en une heureuse rencontre.

                                                                                             Simone Dompeyre

            74 Cinéma expérimental, art vidéo, monobandes - Processus
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