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                             Benjamin BEGEY

          Dicila vit de ce passage constant. La performance n’indique pas LA Voie, elle ouvre la cons-
cience, dans la liberté de la pensée, sans craindre de rappeler nos limites et nos oublis en ces vacanciers
dans l’eau, elle le fait en ce double rappel de la nature d’humain. La gestuelle se fait l’écho des mouve-
ments terrestres, outre le déplacement des glaces, le corps frissonne, se désarticule alors que la falaise
s’éboule. Comment ne pas mentionner ce rapport du microcosme - l’homme, au macrocosme - le monde,
l’un vivant de plus de l’autre.

          Dicila opère de multiples rappels par le recours au mythe, puisque le rocher déplacé pourrait être
celui de Sisyphe, qui, pour avoir cherché à duper les Dieux en détournant les hommes de la mort, fut
condamné à pousser un rocher sur un mont d’où ce rocher retombait immanquablement, l’obligeant à
recommencer cette tâche sans fin. Dicila le fait aussi par l’écho de la Caverne platonicienne, alors que le
performer fait glisser sur lui la projection en petit de ce que l’écran projette en grand, quand il bouge pris
dans l’obscurité, et, quand, dès le départ, il est doublé par son ombre.

           Il sort cependant de ces métaphores, quand quittant l’espace de la projection, il s’assoit sur les
blocs posés sur le côté et regarde la vidéo en même temps que son public qui l’intègre à cette vision. Ce
ne sont plus ni montagne, ni mer, mais des mouchoirs froissés de papier, blanc bleuté, ils volètent dans
cette poétisation filmique du petit.

          Benjamin Begey implique très précisément la dimension vidéo qui n’a jamais quitté son pro-
pos…ni sa performance. D’emblée, il a travaillé sur la dimension écranique. Les premières images de la
banquise n’ont été diffusées qu’en un tout petit espace circulaire dans le noir ambiant, le performer dépla-
çant le projecteur avant que l’écran fût totalement occupé. Ensuite, lui-même a été corps écran. Dans une
forme de cinéma élargi, il participe pleinement, se glissant à tout moment entre la projection et l’écran.
Cela se duplique quand tenant un petit appareil, il fait de telle puis telle autre partie du corps, le support
de couleur, de taches lumineuses alors qu’il est aussi touché par la vidéo « générale ».

            En Dicila, il fonderait son propre et nécessaire écosystème artistique.
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Quant à la vidéo Blue Butterfly, elle porte les mêmes préoccupations et se proposait en boucle dans le
sas où attendaient les spectateurs.

Performances- Processus                                                                                         77
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