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Performances
jouée par Katharine Hepburn –, ce qui, selon le Chimist, opérerait un oxymoron du
rapport éjection/attraction entre Walt Disney et Marcel Duchamp.
Lors de cette promenade mythanalytique, ne se croise aucun corps « réel », ni même
de corps ayant une forme/un morphē corporel, ceux-ci étant majoritairement réduits
à des armatures, sorte de squelettes constitués de formes géométriques basiques
articulées l’une à l’autre pour l’animation en 3D dans un espace virtuel de modèles,
ici humanoïdes. Le seul fragment corporel à n’être pas décomposé ou plus encore
supprimé, c’est le visage ; le visage sur lequel des yeux font l’œuvre – selon les dits
de Duchamp – ainsi que la bouche qui produit la parole : parole à traduire, à trahir ;
parole qui laisse son empreinte.
Pourtant, le corps/les corps est-il/sont-ils indispensable/s à cette promenade,
performative ce qui impliquerait son/leur présence. Le corps est, en effet, transposé
ou même métamorphosé au-delà de l’écran et ainsi transcorporé dans la figure de
l’avatar. Dès lors, le médium de la performance – ici la promenade mythanalytique,
mais aussi les performances du duo Eva et Franco Mattes actuées dans l’univers du
jeu Second Life, pour ne citer qu’un exemple –, n’est plus le corps tangible, mais cette
sorte de prothèse qui va au-delà des limites biologiques du corps et qu’est l’avatar.
D’autre part, le titre y insiste l’énonçant à deux reprises – ce qui est (myth)analysé
c’est la parole/le logos or selon Jacques Derrida, cette dernière ainsi que la voix
qui la porte, sont le signe d’une présence, d’une actualité d’être. Ainsi, laisser une
empreinte – fût-elle trahie – le logotype, dans son sens premier, serait la marque
de refus de la mort ; ce refus manifesté ici par la figure virtuelle de l’avatar. L’œuvre
comme tupos de la parole de son créateur n’actualiserait pas son existence.
Et le Chimist de répondre en concluant la promenade : « L’œuvre n’est pas ce
qu’il est dit. Autrement formulé, c’est le langage/logos qui laisse son empreinte/tupos.
Et c’est l’ultime trap mercian : le sens du logotype était lui-même en tant que logotype.
Tout le trouble n’était que pour nous amener en promenade et répondre à ce débat
Guilberto-Mercien inachevé : il est envisageable d’avoir un artiste sans audience,
parce que ce qu’il dit de l’œuvre est ce en quoi il est empreinte. »
Antoniy Valchev
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