Page 174 - Catalogue_Traverse Vidéo_2018
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photo : Thibault Gaugerenques Performances
Alexis Garcia / Claire-Lise Bouton, Impromptu lyrique
Toulouse, France
Traverse aime la voix, les voix… elle les invite dans sa programmation, dans des
lieux idéaux conçus comme espaces de résonance voire d’amplification comme une
chapelle baroque où se lançaient ainsi les chants vers Dieu ou dans des lieux comme
un lycée où on apprend et pourquoi ne pas y lancer le désir d’entendre des musiques
qui y sont peu fréquentes.
Une mezzo-soprano et un ténor, un duo appréciable formé de Claire-Lise Bouton
et d’Alexis Garcia, étudiants au Conservatoire et pourtant déjà si maîtres de leur
tessiture. Visage levé sans affèterie, ils font corps avec leur partition. Sensibilité de voix
sincères qui atteint ceux qui se rapprochent imperceptiblement jusqu’aux marches de
l’autel, qu’elles disent la peine ou la prière puisqu’elles sont musique, et ce, tout près
de l’installation de François Talairach eau salée1 qui fait écho différemment à cette
question des pleurs.
Un duo : Flow my Tears fall from your springs de John Dowland, un solo d’elle : Agni
Parthene de Saint Nectaire d’Egire, un solo de lui : Ideale de Francesco Paolo Tosti,
décalage spatial et temporel et de genre entre ces trois airs, un même bonheur des
interprètes et des auditeurs.
Dowland appartient à l’époque
élisabéthaine, celle de la première
Elisabeth d’Angleterre, au xvie siècle,
l’époque riche artistiquement et
en paix civile : ce sont en
théâtre, Shakespeare, Marlowe,
Ben Jonson… en musique, Thomas
Tallis, William Bird, John Dowland…
Celui-ci luthiste et compositeur écrit
des pièces chantées et des œuvres instrumentales pour violes et luth dont la plus
connue, Lachrimæ or Seaven Teares Figured in Seaven Passionate Pavans/Pleurs
ou Sept larmes en sept pavanes passionnées se fond précisément sur Flow My
Tears/Coulez, mes larmes ; pièce des plus connues de la musique pour ensemble
instrumental de cette époque et l’un des grands succès du xviie siècle. Chant pour
partie en composition continue, aux paroles compréhensibles même dans les
variations vocales heureuses alors même que le compositeur est dit le chantre de
l’élégie, « lamentable » ce qui alors s’entendait comme délicieusement affligé, dolent,
mélancolique. Et de là, le jeu de mots dont Dowland faisait sa devise « Semper
1 Cf. p. 206.
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