Page 236 - Catalogue-livre_Rencontres Traverse 2019_L'Expérimental-recherche-art
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Installations Lycée Ozenne
renoiriennes. Vénus émerge du gris écumant de la mer et nous regarde, dans la
garde déchirée de ce qui nous est propre et tout aussi impropre : la femme-atlantique
figure l’engloutissement océanique de la Manche et des plages du Débarquement,
la muse nous regarde depuis cette dissolution-là comme une Méduse durassienne.
Quand est-ce, imperceptible pour l’économie du spectaculaire, est ce canto sans parole
pour un continent disparu – l’Atlantide peuplé des noyés que nous sommes quand
nous buvons la tasse de l’oubli de voir mélangé comme un poison au devoir de
mémoire.
Saad Chakali
Jean Sadao, The multi-sensory Impossibility of a Worm
boucle sur écran | 9min50 | Japon
Au centre des travaux de Jean Sadao
prévaut la recherche d’identité au sein de
la société actuelle, dans laquelle l’individu
doit comprendre, se confronter et s’adapter
à des transformations toujours plus rapides.
L’artiste observe avec une attention
particulière le point de connexion entre
nos environnements naturels d’origine et
les courants urbains et technologiques qu’il
interprète comme une relation entre tradition et passé et présent et avenir, entre l’Est
et l’Ouest, dans une perspective qui, d’une certaine façon, s’abstient de l’immédiat,
grâce à une vision d’ensemble, de haut, et des compositions à lire comme une sorte
d’alphabet visuel.
Ainsi de The multi-sensory Impossibility of a Worm qui questionne le corps, les facultés
sensorielles et leurs limites tout en posant l’hypothèse d’un langage tactile et
corporel inhabituel comme moyen de communication susceptible d’atteindre
l’universalité ; il y cherche à saisir les potentielles influences sur la personne
comme sur la communauté. Jean Sadao examine la physicalité dans les possibles
développements de la sensorialité et par là, réfléchit à la manière dont les méthodes
de communication influent sur la formation et la structuration de l’individu, du soi
ainsi que sur les modes de culture et de mode de vie. Pour ce faire, l’artiste brise la
zone d’écran en une polyvision en neuf carrés imposant au spectateur à s’engager
dans un mode de lecture inhabituel, pour lequel il n’est pas encore formé. Il organise
ainsi une stratification des niveaux sémantiques qui provoque le déplacement
perceptuel pour décoder le propos. Ainsi se coordonnent les multiples impulsions
visuelles et auditives, y compris les codes de la langue des signes silencieuse et la
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