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Projections  Cinémathèque de Toulouse

Cinémathèque de Toulouse

Kenji Kojima, Techno Synesthesia: Withering Tulips Three Scales

7min54 | États-Unis

                                                   Ressentir pleinement, retrouver le
                                                   sens premier d’esthétique/aïsthesis qui
                                                   concernent tous les sens en ce plaisir –
                                                   alors du beau – aujourd’hui de l’art, est
                                                   l’invitation de la Synesthésie et celle de
                                                   Kenji Kojima qui compose sa Techno
                                                   Synesthesia à partir des données visuelles,
                                                   par l’algorithme informatique. Cela
                                                   puisque l’ordinateur transforme toutes
                                                   les données sensorielles en binaire.
Cependant le poète des synesthésies exaltait la réunion de la lettre dite et de l’odeur
et de la couleur  : ainsi se réciter à soi-même l’emblématique Fleurs du Mal IV  :
« Correspondances », « La nature est un temple où de vivants piliers/ […] Comme
de longs échos qui de loin se confondent/ Dans une ténébreuse et profonde unité/
Vaste comme la nuit et comme la clarté/ Les parfums, les couleurs et les sons se
répondent. »
Ou le plus érotique baudelairien Parfum exotique « Quand, les deux yeux fermés,
en un soir chaud d’automne/ Je respire l’odeur de ton sein chaleureux/ Je vois se
dérouler des rivages heureux/ Qu’éblouissent les feux d’un soleil monotone. »
L’hypallage y est triomphante dans cette contamination des sensations des hommes
aux éléments qui les provoquent. Sans recourir davantage à sa bibliothèque,
entendre aussi Voyelles rimbaldien qui fait vibrer ces lettres, chacune en la couleur
qu’il leur découvre.
En un bond par technologie informatique, cette approche-ci explicite son
rapprochement en « Techno Synesthésie » de fleurs particulières : les tulipes comme
d’autres partitions-images-sons de l’artiste se dévouent aux saisons, aux paysages
urbains architecture du MoMA ou rues new yorkaises avec joggeurs.
Très loin des propositions transhumanistes, le projet fusionne ce que ressent
l’humain, son désir du beau par une composition algorithmique de la musique. Les
couleurs des fleurs d’un massif si fourni qu’il égrène les tulipes fermées, ouvertes
voire trop ouvertes ou fanées, deviennent notes d’une partition musicale. L’artiste
a créé son propre logiciel le RGB MusicLab afin de convertir une image en musique

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