Page 149 - catalogue_2012
P. 149


Danny WINKLER et Emilia LOSEVA


Genghis Khan's Dreams
Le volume d'un rêve, semblable à une eau dense et sombre, enroule la perception en spirale,
détruisant toute charge fonctionnelle, vidant, ôtant toute vie à l'image familière de la réalité. Un rêve se
divise en strates, segments, avec des fragments de vide et de vols, des fragments de descriptions
détruites et de contextes intermédiaires perturbés. Un rêve ne dure que quelques minutes et il est tortueux
dans ses choix. La forme d'un rêve est fragile, la perspective s’y érode, l'information y est irrationnelle. La
potentialité visuelle est toujours plus grande que celle de la réalité, la camera y joue å la fois le rôle de
médiateur et celui de victime, elle favorise la réalisation de fantaisies et d’impromptus, dépassant la
frigidité des normes avec pour seul but de façonner un nouveau corps perceptif. La caméra s’est imposée
sur les habitudes du tout-permis pour éviter les conflits qui appauvrissent toute relation comme tout rêve.
Le scénario est ouvert, il a son intrigue et la possibilité d'aventure, il est au-delà des catégories du gout et
de la connaissance.
Se libérer du fardeau d'une interprétation, passer du possible à l'impossible, perdre l'orientation
et la boussole, perdre le guide – promet un voyage excitant. Quand les couleurs perdent leur nom et leur
définition, leurs nuances, leurs gammes vibrantes forment un espace infini, la tentation du vertical,
l’intégralité de la lumière-espace. La performance d'un rayon, la réfraction de la vitesse et de l’intensité,
l'attention désintéressée comme fanée, exhibent non pas la forme en elle-même, mais la beauté de la
source de l'existence de la forme.
Toute image est initialement porteuse de lumière, naissant telle une sphère, dynamique et fluide,
pendant que la cinétique de la perception tend à transférer l'image dans le langage des choses. Les
formes inertes se déchaînent contre l'incarnation: la dentelle d'une nappe tombe dans un gouffre intérieur
telle la neige dans la nuit; l’endormi Genghis Khan est seulement un brillant contour sans corps; les cartes
sont mélangées comme si c’était leur projet– leur symbolique est vague pendant qu'elles prédisent
l’avenir; les ventilateurs flottent comme des anges – c'est leur destin de vibrer en réfléchissant la pression
des vagues chaudes; les fleurs tombent en pétales; les photographies jaunissent avec le temps et l'image
du cher et tendre fane aussi; les dieux et les Golgotha perdent leur identité en une claire luminescence, de
voile et de crêpe.
Et tout se déchire et dès lors – il est très difficile de se rappeler et de prédire...

Danny Winkler, traduction Traverse Vidéo
































Installations / Expositions - Faut Voir 149
   144   145   146   147   148   149   150   151   152   153   154