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Danny WINKLER et Emilia LOSEVA


Genghis Khan's Dreams
L’héraldique dérangé du rêve


La lumière nous renvoie toujours å la conscience, qui å présent dirige seulement la périphérie.
Le milieu est encore obscur.
C.G.Jung


... et le rêveur tombe dans l'abysse. Dans un rêve, la part
rationnelle de la conscience reste active la dernière, c'est
pourquoi tout ce qui s'y passe est perçu nettement. Si
surgissent des difficultés de perception, c'est qu'elles sont
exclusivement liées au pouvoir oppresseur des événe-
ments, qui diminue l’intérêt de s'y confronter et cause la
perte d’une précise attention mais ce sont le risque et
l’inconnu qui font le monde vif, en d'autre termes – libéré.
Tout infini a ses propres méthodes de continuité, toute
fin est le début de quelque chose d'autre. Toutes les
méthodes de continuité s'enracinent dans une des fonc-
tions principales du mystère en relation avec l'inertie des
sens et avec la résistance de la matière, porteurs de la
stagnation, de l’oubli et de l’inconscience du rêve. Chacun
en a fait, au moins une fois dans sa vie, l’expérience, pour
un moment de vérité nécessaire, claire et convaincante,
alors que les expériences fragmentaires se mêlent en une
seule image. Lorsqu’on dépasse cette fragmentation de
l’éloignement, on se tient sur le seuil d’une obscurité
lointaine, où réside une énigme, le vent y est constant, et
chaque chose y change sans cesse, se transformant et s'échappant au loin.
La structure de cette vérité se fonde sur la binarité de la conscience humaine, sur l'opposition
entre la perception et l’expérience de cette insondable obscurité, pleine de cet inexprimable pouvoir et loin
de la lumière de la compréhension où chaque composant et créations sont réunis. L’arrière-plan, sa
vacuité, sa pulsation, son contrepoint, ses clefs de la palette – tout y est soumis à la commande de
l'impulsion hypnotique d'une participation imprévisible.
Rêver disperse l'ennui et la monotonie des clichés, rassemble l'attention et compose l’asymétrie
des contours, crée un espace sans temps, un temps – sans espace. La perception est libérée de l'espoir
primaire d’un portrait fixe et stable du monde ainsi dessiné pour toujours. Le sol sous les pieds devient
marécageux, la notion du centre se dissout dans la texture, devient une partie de la texture. Le vécu
premier de l’expérience provoque une réaction de défense qui vient « d'en bas », mais l'aspect total est
évidemment compensé « vers le bas », ce qui provoque une frustration née de la confusion entre ce qui
est « droit » et ce qui est « gauche ».
Un rêveur ne peut reconnaître la symétrie parce-que si la lumière tombe sur l'image globale,
toutes les images auront la même valeur, mais lorsqu'elle tombe sur un détail, cela provoque la confusion
et active un inconfort émotionnel. L’héraldique du rêve couvre complètement le rêve, dans son armure
intégrale, sa nature, ses motifs, sa gestuelle et ses allusions ne peuvent être identifiés. Luttant contre
l'ombre, un œil tente de localiser la source de lumière pour son propre profit.
Errant à la périphérie des descriptions du monde, sombrant dans le réel et l’irréel, avec une immunité
parfaite contre l'inconnu, surgit là, l'incapacité décourageante de simplement allumer la lumière.






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