Page 98 - catalogue_2012
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Fabien GUIRAUD
Burn n’ Roses
Titre, a priori, à ne pas traduire car qui brûlerait les roses ; titre qui fait écho à un groupe de hard
rock, mais le seul son est son du réel, ainsi que quelque vol de la voix entre l’assistant et le filmeur.
Sur un parking peu occupé, l’été sous le soleil qui fait garer des voitures sous des arbres, au premier plan,
incongrue dans cette position centralisée et sur le passage des véhicules, une moto rutilante est garée
dans son oblique naturelle.
Le vide de part et d’autre et la très grande profondeur du champ tout aussi dépeuplée, en font le sujet de
l’image. Elle s’avère médium de dessin.
Un jeune homme - Benoît Debretz - le générique identifie le performer - s’approche et manie l’engin, sinon
comme un crayon, le poids et la configuration l’empêcheraient, mais pour tracer, moteur allumé, un cercle
puis dans celui-là, des courbes jusqu’à dessiner les pétales de cette rosace. Les pneus y laissent de la
gomme noire - burned - pour cette fleur - rose - inespérée.
Au fond de cet espace, des jeunes font des acrobaties avec leur véhicule de moindre cylindrée - avant de
se risquer sur la bande à venir vérifier cet autre usage d’une semblable machine. A leur insu, leur impromp-
tu reconnaît l’étrange « ajustement » de Fabien Guiraud.
Le plan fixe adopte celui de la page, la moto s’allie au bleu du ciel. Lors de cette motométrie, écriture avec
une moto, plus précisément, une pneumétrie puisque c’est la chape qui trace les figures comme une
énorme craie noire, le manieur regarde vers l’artiste qui entre dans le champ par ses indications sonores,
ou son approbation, saisie dans le regard et les mimiques du « dessinateur ».
Boutade ou sérieux… s’y peut convoquer le mandala, diagramme cosmique, par la forme circulaire mais
le monochrome ne répond pas aux exigences de cette carte symbolique du monde, de l’esprit et de la
conscience humaine ; d’autant moins que le dessin reste simple à six ovaloïdes à pointe brisée, loin de la
complexité géométrique portant les étapes du développement psychique de l’ignorance à l’illumination
ultime, le Nirvana.
Le projet est plus proche, il atteint la cécité face au quotidien. Il prend le mot, il prend la chose, il en
prouve la plasticité, il en déborde l’usage arrêté. Sans leçon, il ne lance pas une nouvelle école avec
appareil à moteur, mais il fait là, acte.
Simone Dompeyre
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