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Christin BOLEWSKI
Universal Tourist
Le titre sans ambiguïté classifie son objet, sans méandres, les différences sont annulées… pour-
tant le film ne s’en tient pas à ce constat d’universelles pratiques ; il suit les touristes qui eux-mêmes s’au-
to-photographient. Mise en abyme désormais, elle-même cliché de ces touristes.
Le film filme les « photographiant », ces voyageurs qui posent sur le monde une première distance, la
prothèse oculaire. Garder, stocker des images devance le voir pour voir. Il faut de la trace, au-delà de la
jouissance de la découverte.
On ne photographie plus, on PREND une photo de soi sur un fonds réduit en décor.
Plus encore, la trace ne se peut transgressive à cette manière sociale ; elle en garde les codes tout autant
qu’elle la prend en obéissance au code social.
LA pose même si elle se croit adéquate au lieu, se répète ; la mimesis a gagné les comportements ; et
quand ses comportements sont la photographie, celle-ci engage plus encore ce mimétisme.
On prépare la photo à montrer, lui ôtant la part de hasard de la street photography/ photographie de
l’instantané de la rue. Rien n’y est désormais décisif. L’impact est perdu pour la répétition à venir de la
monstration sociale.
Paradoxalement la photographie amateur colle totalement aux codes alors qu’elle se pourrait à l’invention
du regard.
Et cette perte de latitude, le rythme du film qui s’achève en un flicker ravageur, l’assène.
Ainsi petit problème mathématique, avec des inconnues : sachant qu’un appareil photographique prend
une image en 1/100e de seconde et même peut réagir au millième de seconde et que XXX touristes se
déplacent pour prendre la même photo dans les endroits éloignés de la terre, combien de mêmes clichés
sont-il pris en une journée ?
Simone Dompeyre
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