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Collectif ENDOGÈNE
Portraits aux nues
Jean Paul Noguès aime les mots, il aime les corps, il sait reconnaître la puissance de sens des deux et
leur cherche des rencontres. Il s’en explique pour Portraits aux nues, alors que d’emblée son titre déborde un genre
en se jouant des mots : nues les femmes le deviennent d’elles-mêmes, dans l’élévation de leur reconnaissance de
femmes – ( portées ) aux nues. La parenthèse implique le refus de toute divinisation, inutile pour qui reconnaît que
l’être humain se suffit, que la féminité est et que l’on peut doit « la louer avec enthousiasme ».
Jean Paul, ce faisant, instaure une relation entre le faire et le penser, il filme des femmes aussi diverses
que nous pouvons l’être, dans des lieux extérieurs ou leur lieu intérieur, en vêtements de ville, se déshabillant et
nues, alors que en over des mots sont prononcés en diverses voix toutes féminines. La source de son projet d’ins-
tallation rassemble sans hésitation, la résultante de sa pensée et l’origine de sa pensée. Il choisit pour le dire, le
grand « ancêtre» : « En 1932, L’Idée de Berthold Bartosch personnifiait le concept d’idée en une femme nue. Idée
et / ou femme que les dictatures condamnent mais qui survit à ceux qui la combattent et à ceux qui meurent pour
la défendre. Depuis quelques années, les femmes osent la nudité pour revendiquer leurs droits dans des mou-
vements comme les Pussy Riot, les Femen, Free the Nipple, ou encore Aliaa Elmahdy, en réaction à la montée du
conservatisme. Leur option prouve que la nudité dérange encore au XXIe siècle cependant elle ouvre la réflexion sur
la potentialité qu’elle ouvre. En effet, si la notion d’idée peut être portée par une femme nue, alors un ensemble de
femmes nues peut-il incarner une multitude d’idées par leur diverse personnalité »
Les femmes de Portraits aux nues ne sont pas les profératrices, si elles ont énoncé ces mots, le mon-
tage vidéo les retient sans mouvement des lèvres, en position fixe – sauf lors de leur déshabillage volontaire avec
le regard frontal de règle tout au long du processus. La contrainte de la position, de la posture, de l’impassibilité du
visage, la demande de mots n’est pas - n’ont pas à être - explicitées.
Le dispositif pour Traverse Vidéo réunissait mots et corps, le miroir n’était pas d’un écran iconique et
d’un écran réservé aux graphèmes mais de deux écrans face à face en haut de l’escalier emprunté pour atteindre un
cours de dessin, un espace d’art, chaque arrivant le recevait sans en être prévenu. L’installation l’arrêtait. L’installa-
tion en ce lieu visait à rendre le choc de l’audace des femmes et en filigrane leur portrait. La perception mots - icones,
en même espace audiovisuel, a, par ailleurs, détaché certaines tonalités, certain grain de voix les réunissant à des
termes. De telles unions esquisseraient des préoccupations individuelles, d’autant que, parfois aussi des termes
sont entendus simultanément à de rares mimiques du visage : celui qui s’émeut en un sourire retenu, la moue gênée
de n’avoir pas su retenir le bras devant rester le long du corps, le terme « expressionnisme » se lie à une certaine
tristesse / Islam, à la nudité du corps et au sourire net. Le montage refuse la sage succession de trois mouvements,
il préfère le montage métrique, perturbant la trop facile conclusion; si le point de vue est clair, l’approche n’est pas
linéaire mais par ricochets, en une durée nécessaire - 50 minutes - pour apprécier l’implication des femmes- sujets
et nous faire partager l’implication.
PRÉP ‘ ART SUD
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