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Matthieu FAPPANI

  Matthieu est déjà sur un nouveau champ : le relief. Le bas-relief détache les supports de leur usage habituel ou
y adjoint des ingrédients plus inattendus; les masques extériorisent en volume le portrait jusque-là distordu sur le
plan, ou étiré / dissout dans le mouvement. La quête qui anime Matthieu l’entraîne vers des expérimentations de
matériaux. Ainsi quand le masque se fait de plâtre, c’est plus que rarement le seul produit, il est rejoint par le plas-
tique, le cellophane, l’altuglas thermocollés; le support peut être une branche de bois ou des champignons séchés.

              Plus encore, il rend à « relief » d’autres possibilités et joue avec l’acception « collage » puisqu’il colle
directement sur le mur ainsi qu’un artisan poserait un papier peint, un collage mural Inside Reflection. En première
traduction : Reflet intérieur est un montage photographique de photos de l’atelier de l’artiste dont étagères, murs,
meubles sont couverts des masques, des portraits, des productions diverses et d’autres objets ou instruments né-
cessaires à sa création.

              L’œuvre inclut les œuvres passées, elle se fait L’Enseigne (de Gersaint) de Matthieu Fappani. Wat-
teau composa une toile censée signaler aux passants la boutique du marchand d’œuvres d’art et d’estampes,
Edme-François Gersaint. Gersaint qui expliqua que le peintre lui avait demandé « pour se dégourdir les doigts,
(…) de lui permettre de peindre un plafond que je devais exposer au dehors… ». Cette œuvre peignait le lieu de
l’acquisition mais les peintures des cabinets de peintures étaient, dès le siècle précédent, très en vogue parmi les
collectionneurs flamands au XVIIe siècle qui, par elles, exhibaient leur bon goût, l‘étendue de leur richesse et de
leurs collections.

              Plus humblement, Matthieu prend un coin de son atelier, avec des étagères fournies, où se côtoient
petits formats et pots ou bombes de peinture, crayons, œuvres et outils et un petit Rubik’s cube revu et corrigé dont
les carrés retiennent un portrait, semblable à celui entouré d’un cadre quelque peu biscornu.

              Ce serait une trahison à ces projets précédents dont certains figurent dans l’espace, si la visibilité de ce
reflet intérieur ne requerrait pas une activité, un regard aidé pour visiter cet antre de la création. L’œuvre réclame des
lunettes 3D, puisque son impression est en anaglyphe. Nouveau recours au grec pour saisir ce qui conduit l’artiste
dans ce nouveau champ. Glyphe, base du terme c’est la « ciselure » et le sculpteur grec désignait par anaglyphe,
la « ciselure en relief », le « bas-relief » comme tout « ouvrage sculpté ». Son emprunt garde la notion de vision en
relief mais il n’est qu’illusion d’optique tenue grâce à l’emploi de lunettes appropriées, avec deux filtres de couleurs
différentes, disposés devant chacun des yeux de l’observateur. On y reconnaît le principe de la stéréoscopie agen-
cée de manière à ce que notre cerveau utilise le décalage entre nos deux yeux pour percevoir le relief.

                                                                             Simone DOMPEYRE

                                                      Photos : Roberto ÀLVAREZ

                           GALERIE CONCHA DE NAZELLE                                                                        113
                                   INSTALLATIONS

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