Page 92 - catalogue_2016
P. 92


Photographies Traverse Vidéo 2016 - L’atypique trouble 92


Laura BONNEFOUS, Relics, Fr.
L’ Histoire a été inventée
Hybride d’un passé et d’un devenir incertain
Le peuple a muté
Comme le fruit mûri d’une humanité parallèle
Les corps sont industrialisés
La peau a accepté l’outil tel une offrande
La posture est objectée
Le sang est blanc, glacé
La machine se prend à bras le corps
Pour former une armée de chimères dont
la fonctionnalité paraît invisible
Mais indivisible
Il y a comme un air de sacré
De mythologie au mécanisme fgé
Ces corps statuent dans un temps sans âge
Et sculptent un reliquat de souvenir
D’un futur dépassé ou trop loin
Vestiges rêvés d’un monde décalqué
où la gravité se trouve suspendue aux lèvres
Comme le récit d’une ère refroidie
Les restes d’une archéologie personnifée
D’un Jadis et d’un Demain
Texte d’Irinat Mazuet
Il est commun de dire qu’une photographie rend la présence de celui qu’elle portraiture, d’autant que
c’est son usage social…pourtant dans les cinq portraits séparés par d’autres fgures prolongeant l’étrangeté
de leur abord, s’immisce une distance attirante. Cinq jeunes personnes hommes - deux- et femmes, torse
nu ou simplement en tee-shirt sans manches, blanc - l’heure n’est pas à la photo de mode ; genre que
Laura détourne ailleurs, avec piquant - posent, en plan frontal, sauf l’un de profl, tête penchée l’abat-jour
de bureau comme couvre-visage, sauf l’une laissant couler ses cheveux rouge roux sur son corps un
peu enveloppé. Leur visage est masqué, dans l’incongruité absolue par des outils ou objets du quotidien.
Sans titre autre que celui désignant leur particularité, ils deviennent l’homme à la lampe quand métallique,
elle occulte son visage / la femme à la clef plate et la femme à la défonceuse de bois quand un tel outil
de fer ou de bois ôtent la possibilité de saisir le regard, pourtant considéré comme l’indice le plus per-
sonnalisant / la femme au foret de bois quand celui-ci, tenu par sa bouche, tend sa ligne diagonale / et
le seul auquel le regard soit laissé l’homme aux clous longs de charpentier sur l’épaule. Tous en sont
fascinants. Très loin de l’univers robotique, ces êtres hybrides font pourtant signe vers un a-humain.
Êtres prothétiques.
Cependant l’univers de Laura Bonnefous s’éloigne des expériences à la Stelarc - troisième bras ou con-
nexion technologique le dirigeant - les éléments rajoutés ne sont pas des succédanés d’impossibilité pour
l’humain ; ils ne visent pas à lui donner des capacités surhumaines tout au contraire, ils sont manuels,
usés, anciens voire obsolètes. Ils interdisent que l’on réduise l’image à une ressemblance voire à une
identité avec son référent. Ces portraits auxquels se mêlent des « portraits » de formes de plâtre blanc,
insuffent que l’image compose un autre que celui qui fut derrière l’objectif… que l’image est trace -
Relics les nomme l’artiste - qu’elle est monde fottant entre l’être et son absence. Simone D.
- 1. Espace culturel Croix-Baragnon -
   87   88   89   90   91   92   93   94   95   96   97