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FLATFORM




Domenica 6 Aprile, ore 11:42, 6’10, 2008
Domenica 6 aprile ore 11.42, cette précision type procès
verbal, induit l’attente d’événements.
Evénements qui n’ont pas lieu, mais pas davantage lieu
d’être. La vidéo impose un temps de la non brutalité, de
la connaissance du lieu, cela en titillation de la pensée.
Au-delà du lieu vallonné, du hic et nunc, de petites
actions quotidiennes, cette heure notée à la seconde,
est un lieu de la parole, vive, performative et réflexive.
Un dimanche à la campagne, pourtant le facteur fait sa tournée ; une voix féminine très loin de
lui mais à l’acuité toute expresse le reconnaît, il avance sur la route avant sa rencontre avec le garçon à
la bicyclette auquel il confie le courrier adressé à sa famille, et avant de continuer sa distribution.
Le garçon à la bicyclette, les trois garçons joueurs, les deux pousseurs de la voiture en panne qui leur
échappe sur la pente avant de stopper… autant de faits même pas divers, ceux du quotidien de ces
vallonnements verts, aux courbes parfois redessinées par les routes dites de campagne parce qu’étroites,
ou par les clôtures organisatrices d’un schéma sur ces terres.
Ces activités multiples, eu égard au petit nombre de l’habitat, donnent prise à la narration ; elles transfor-
ment le calme bucolique en champ d’activité(s).
La terre est le lieu des hommes, ces êtres-là microscopiques, enveloppés d’une aura blanche
qui les discerne, les détache sur la route poudreuse ou le vert de l’herbe. Ainsi se réveille le palimpseste
: cette terre-là, fut espace allégorique que Lorenzetti peignit sur les murs du Palais des Seigneurs de la
République, en dotant d’un phylactère d’éloge à la cité, un esprit féminin ailé seulement entre - vêtu d’un
drapé, lointain héritier des victoires antiques.
« Que chacun avance et sème et laboure sans peur tant que la commune sera honnête, sous le
commandement de cette dame - sécurité - car elle empêche que les méchants aient le pouvoir / Sença
paura ognuom frmco camini elavorando semini ciascuno. Mentre che tal … »
Le dimanche vidéographique arpente ces lieux, des fermes s’y inscrivent. La plongée du plan
général épouse une aussi vaste typographie mais loin de tout appel à la crainte par antiphrase, ni même
de potentialité de méchants.
Les hommes sont en lui qui n’est que des mouvements d’eux-mêmes. Sans ces incidents, jeux et rires, ou
rencontres, ce ne serait que cadastre vide ou carte postale figée.
De cet espace sous la voix, se fraie le vivant. Un processus fonde cette indissociabilité
humain / monde ; espace / homme.
La campagne siennoise et/mais deux voix. On aurait tord de cantonner la première entendue et féminine
à une fonction descriptive, même si la crédibilité profite de la coïncidence de ses dires et de certaines
activités, par exemple la voiture arrêtée, récupérée, repartie jusqu’à la cour d’une des fermes.
Très actante, cette voix précède, quoique de très peu, ce qu’elle est censée découvrir se faisant, depuis
le promontoire où elle est censée se placer pour précisément tout voir.
Elle réitère la signalisation, en phrases courtes, entrecoupée par une voix masculine qui conceptualise les
questions d’espace.
Le duo se complète. Le dire c’est le faire, puis le dire c’est l’inventer en idée.
Elle part / parle de loin, de l’extérieur et, dès lors, se garde de dénommer, s’en tenant aux catégories
« ragazza / ragazzo » ou aux indéfinis « qualcuno », avec une seule précision de métier « il postino ». Pas
davantage de qualificatifs ou d’outils modalisateurs : les verbes à l’indicatif désignent le geste, l’activité,
les réactions « suivre le chemin ou continuer la tournée », courir ou avoir du plaisir, rire…







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