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Carte Blanche au Collectif Jeune Cinéma (CJC)




Yves-Marie MAHE, Ferme ta gueule, 2'30, 2011
La manipulation d’un plan séquence de « Havre » de Juliet Berto, en fait un clip
pour Siouxsie And The Banshees.
Son travail est rapide et agressif. Le souci de valider le rapport fond/forme reste
omniprésente. Son agression n'est pas gratuite. Elle est accompagnée par une
forme de distanciation qui passe par l'ironie. Bien que se revendiquant du
cinéma expérimental, son cinéma est empreint du lettrisme, du situationisme, de la revue "hara kiri" et du
punk. Souvent, il fait lui même les musiques de ses films.



Pierre MEREJKOWSKY, Il était une fois l'écologie, 12', 2010
L’essai, au cinéma, peut induire un discours personnel, une démarche
introspective, en ce sens, un auteur assume son point de vue, Il était une
fois l’écologie affiche résolument le sien avec cependant la distanciation
liée à cette formule incipit du conte.
Or elle émane du Comité Anti-Nucléaire de Paris, que le réalisateur, Pierre
Merejkowsky, a fondé et dont il est LE corps. Micro en main, Merejkowsky
en évoque la création, en décrit l’organisation et les actions ainsi qu’il en
explique la source politique. Chemin faisant, il affirme, assène même son
projet en une écriture brute qui ne cache pas ses points de suture.
Sa démarche reconnaît être portée par le Groupe Anarchiste Juif Expérimental, groupe fondé lui-aussi par
Pierre Merejkowsky ce que ne dément pas le générique - carte d’identité d’un film - qui, parlé face à la
caméra ainsi toujours convoquée mais dans un contrejour devant des jouets, impose le refus des codes.
Le discours opère des variations de ton peu communes : de rapides et enjouées, les inflexions se
ralentissent, la voix prend un ton plus grave jusqu’à devenir quasiment inaudible, mais avec une pincée
de littéraire. Ceci estompe le témoignage en le stylisant, et de spontané, il devient théâtral.
Certes, le montage privilégie les raccords cut et des plans-séquence de plusieurs minutes ; une telle
réduction du nombre de plans exprime l’urgence mais aussi la directivité de la réalisation menée par
Merejkowsky. Plus nettement encore, en mise en abyme de son processus, l’annonce de la fin du film par
le réalisateur comme les fils du micro qui l’entravent imposent le film comme un essai politique résolument
hors des lignes de conduite des grands partis.
Il était une fois l’écologie la formule entraîne du côté du topos du conte, alors même que la
question de l’écologie est réclamée par Merejkowsky, qui considère l’organisation du comité anti-nucléai-
re comme LA nécessité tout en la comparant à un grand jeu lorsqu’il évoque les manifestations. Il est
enjoué durant la description des actions politiques, comme pourrait l’être un enfant lorsqu’on lui raconte
une histoire ou qu’il la rejoue. A l’inverse, c’est dans une cage d’escalier austère aux murs nus,
tranchant avec la salle de jeux du début, qu’il évoque la fin du comité en rappelant la candidature de René
Dumont aux élections présidentielles, synonyme de politisation de l’Ecologie pour Merejkowsky. Une orga-
nisation spontanée et passionnante trahit sa nature quand elle adhére aux codes de la politique, et ainsi
elle se suicide ; et Merejkowsky de se taire durant La minute canonique, brisant net son discours en signe
de deuil du comité mais aussi de l’écologie.
Pierre Merejkowsky actue l’histoire du comité anti-nucléaire de Paris comme sa propre expé-
rience, en refusant le rôle d’archiviste, pour endosser celle du militant accusant ceux qui ont tué ce
courant. Il l’assure en conclusion Il ne parle pas du passé, d’un fossile de l’action écologiste, mais d’un
idéal et d’une idéologie auxquels il croit et au nom desquels il use des armes de l’agit prop.


Jean Marguier, étudiant en montage BTS audiovisuel Lycée des Arènes




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