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Mehdi FARAJPOUR
My name is peace. I’m coming from USA...
De ses débuts sur scène en tant que mime, Mehdi FARAJPOUR garde la confiance en la
lecture du corps. Il garde les mots gestuels d’autant que sa découverte du butô l’engage définitivement
dans cette expression sans le verbe. Il n'est pas particulièrement un artiste ou danseur de butô, mais il est
un chorégraphe qui seulement essaye d'étudier cette forme artistique dans ses travaux chorégraphiques.
Le butô est cette pratique que le Japon d’après guerre, a provoqué, expressionniste et réaliste, Mehdi
FARAJPOUR la vit comme une évidence puisque la composante corporelle n’est pas sans sa composan-
te pensée; entre théâtre de la réflexion et danse différente, il porte son discours avec fureur.
Cela 2002 le prouve, puisqu’ alors qu’il fonde l’Oriantheatre, une compagnie « sans frontière » qui
recrute et invite dans le monde entier, il publie son premier livre, The Monk performers, en conclusion de
sa recherche sur la relation entre le corps et l’esprit, y compris lors des exercices d’entraînements des
danseurs et comédiens.
Cette forme rejoint la performance, un projet, le corps agissant, signifiant et un lieu comme lieu de
confrontation.
My name is peace , I’m coming from / je m’appelle paix et je viens de est suivi selon les
espaces de la manifestation d’un nom de pays emblématique d'une ligne de front ; d’un pays générateur
ou victime de la guerre.
En Pologne, c’était Asia, à la Chapelle des Carmélites se fut « from Usa ». La présence de Golnaz
Behrouznia, une jeune Iranienne, artiste installationniste, entraîna la traduction mêlée de ce titre-projet en
cette langue maternelle du performer…
La chapelle s’est obscurcie, le souvenir des formes, désormais, cachée de ses images religieuses, flotte
sur la foule dont le nombre aggrave le poids de l’attente.
L’attente a lieu. Le silence y est acté.
L’emplacement d’un écran de projection sur l’autel, en l’absence évidente d’un appareil de projection fait
signe vers ce qui se prépare derrière.
La performance est commencée avant même l’actuation du corps.
Corps découvert quand deux assistants ôtent ce qui rend à l’écran son second sens : cacher. Un corps
dont la position, jambes levées mais en angles brisés, bras à l’identique, se dessine sous un grand drap
blanc.
Après une stase, le corps se dit : zébré de pansements que la pénombre confond d’abord avec des croix
tatouées : la dénotation des sparadraps porte cependant la connotation de telles marques de la douleur.
Les chaussures s’affichent rangers de soldats, connotant la démarche de la destruction.
Un corps douloureux et blessé si visible dans le tissu restreint de la pratique Butô, qui s’achemina en des
minutes allongées de sa lenteur, descendant les marches de l’autel en courbures et lignes brisées, mains
tendues droit ou levées droit, tête nette comme ne voyant rien de ceux qui l’entouraient retenant la respi-
ration.
Plus tard de ce moment lourd, prégnant, la tonitruance d’un bombardement attaqua nos oreilles jusque là
agressées par le silence…. Et Mehdi Farajpour lança des enveloppes… roses, sur lesquelles se précipi-
tèrent certains, d’autres non, tant ils étaient pris dans l’inquiétude ou dans une sorte de crainte sacrée.
C’étaient les images des conséquences sur des corps d’enfants – le plus souvent ?- au sol, brûlés,
détruits, morcelés, anéantis… Celles qui sont précédées dans la presse, de l’avertissement aux person-
nes sensibles, dans l’accord avec cette pensée performée.
Simone Dompeyre
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