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Vincent CICILIATO
Ordinary Compulsions
“Tout d'abord, le constat d'une qualité esthétique propre au mouvement compulsif, qui, par son
caractère cyclique et stéréotypé, affiche certaines affinités avec le geste dansé, dans son sens le plus
large. Cependant, Ordinary Compulsion ne se veut ni vidéo-danse, ni témoignage documenté sur le geste
compulsif, mais plutôt une vision poétique sous la forme d'une fiction nourrie de témoignages et d'expé-
riences personnelles. Une histoire de gestes à la fois familiers et ordinaires, et inquiétants, étrangement
inquiétants.”
Zbig avait entraîné, en 1981, un tango en poly-saturant un espace de la présence rémanente
des diverses personnes entrant, sortant dans une petite chambre sobrement meublée ; s’y succédaient un
enfant entrant par la fenêtre pour y récupérer un ballon, un homme s’y électrocutant en changeant
l’ampoule du plafonnier, un couple y faisant l’amour et d’autres s’y distinguaient par l’âge et les occupa-
tions que nous prête la société. Le même Zbig le long d’un travelling - désormais numérique -au rythme
du titre éponyme Imagine, en 1987, métaphorisait la vie d’un petit garçon passant lui aussi par la fenêtre,
et entraînant celle d’une petite fille grandissant à chaque porte poussée et franchie… avec des occupa-
tions que nous prête la société.
Le lieu de cette installation-ci, sans marque précise, pourrait être celui de divers bonheurs du
jour. Ce lieu/boîte fermée à laquelle accèdent par une porte, cinq personnes hormis la première venue du
noir iconique, ne les accueille pourtant pas pour une réunion puisque ces irruptions successives ne
transforment pas celui/ceux qui les ont précédées ; leur corps s’ajoutant dans des espaces parallèles,
comme l’on dit montage parallèle, sans preuve de sa vision des autres.
Les composants ne s’associent pas pour produire une histoire où chacun aurait une fonction
actantielle, mais chacun - à son insu - concourt par l’assemblage pensé que l’on en fait, à produire du sens
sur un concept, une théorie, un point de vue. Les espaces parallèles dans le même champ condensent
des comportements dits TOC… des variations sur l’impossibilité de refréner sa gestuelle. Le propos n’est
pas médical pour autant, les épiphénomènes n’adhèrent pas au réalisme.
Pas plus que la porte, le porte-manteau n’est lié à un mur - mur absent, fond sans fond - la
première surgit en descendant, l’autre latéralement comme l’a fait d’abord une chaise ancienne mais peu
luxueuse, pas davantage le lavabo n’est alimenté par un quelconque dispositif. L’eau surgit du robinet sans
assouvir le désir de laver ses mains de la dernière arrivée, mais ses vêtements comme ceux de deux puis
trois autres s’humectent et dégoulinent bientôt. Des conséquences sans cause. Selon un montage
métrique interne, les gestuelles répétitives conduisent à ces résultantes et des bruits de réel s’accordent
à cet envahissement.
Installations / Expositions - Histoire(s) 101

