Page 105 - catalogue_2013
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Gwen GERARD
Dormissimo
“Dormissimo se construit sur le rendu en perspective de l‘image en mouvement. Une image
projetée sur un tel écran en 3D ouvert, induit à s’immerger, à faire corps avec l‘installation.
Cette proposition s’ouvre à une double lecture, projective et introjective à la fois. De phénomène optique
extérieur, l‘image en mouvement devient enveloppe et s’allie ainsi à l’intime et s’associe au corps du
visiteur qui en déambulant, multiplie directions et points de vue.
Le polyèdre/écran aux proportions d’or se souvient de la Melencolia d'Albrecht Dürer et il épouse l’oblique
du visage d’une Muse Endormie de Brancusi ; l’échange onirique entre le spectateur et la dormeuse peut
dès lors commencer.”
L’objet happe, dès l’entrée de la chapelle, ce que réclament ses dimensions de trois mètres
quasiment multipliés en sa base triangulaire alors même que sa forme éveille des souvenirs….
Elle flotte autant que sa structure qui l’enserre le lui laisse faire, car en toile à beurre triviale, elle garde de
la transparence et de la légèreté. Une face du tissu se soulève sur un seuil qui invite par une broderie-main
inattendue à entrer… ce n’est pourtant pas une maison de jeu où se tenir debout…. et le lieu est occupé
par un visage de jeune dormeuse, le plus souvent les yeux fermés selon l’injonction de ce qui s’avère en
son italique, un titre Dormissimo accordant au sommeil ce superlatif. Ce sommeil est porté par des varia-
tions sur alto, improvisations jouées par une autre jeune fille Lisa Cardonnet que le film découvre en fin.
Plutôt de l’ordre mineur, elles répondent à l’origine de l’installation, le polyèdre de la Melencolia de Dürer
que Gwen Gérard dénomme aussi en fin de bande, en y incluant l’image de la gravure originelle selon un
long travelling vertical porté à son tour par des respirations de dormeurs.
S’y accordent ses trois intertitres, avec des lettres majuscules mais en graphie des plus simples
et lisibles : ICI BAS / HORS de SOI / HAUT de Là dont la troisième étape, ôte la dénotation religieuse en
transformant, le monde d’ailleurs, l’au-delà en localisation répondant à la trajectoire réclamée pour
l’appréhension de l’installation. Regarder, voir, écouter, se souvenir. Cependant au hors de soi, ne répond
aucun signe d’exaspération ni même de simple agacement. Cette sortie quitte aussi le noir et blanc, y
compris pour colorer une fois le visage dormant, ou suivre des pieds dansant, ou des mains jouant sous la
toile, elles aussi rosies ; aucune oppressante mélancolie au sens généralisé du terme.
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