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Charlie JEFFERY
Endless forgetting
Tourné en film super 8, cette course à travers champs, vallons et collines provoque autant de
paysages, paysages empreints de la vie que lui délègue la course éperdue d’un homme que le plan
d’ensemble empêche d’identifier.
Rien d’autre n’intervient que les formes du lieu et l’effort de la course. Pourtant la fascination impose de
rester, voire de suivre dans le champ la direction adoptée qui ne fait signe vers rien d’autre qu’elle-même,
dans ce lieu homogène ; si homogène qu’il n’induit pas d’autres comportements que la course.
La traversée de ce type d’espace et ce comportement réaniment la mémoire vers Fischli/Weiss
qui déconstruisent les archétypes de la pensée et de la vie contemporaine selon des apologues qu’ils
jouent eux-mêmes. Ainsi déguisés l’un en panda, l’autre en rat, lors d’une randonnée dans la campagne
aussi verte que celle-ci, ils s’y confrontent aux éléments et à eux-mêmes, pour chercher leur raison d’être
avant de conclure qu’eux-mêmes sont très proches de la bonne manière/du droit chemin, de la bonne
morale ; ce qui est le titre de leur vidéo, de 1983, Le Droit Chemin. Ils y cultivaient la même dérision que
La Moindre Résistance, en 1981, censée mener une enquête dans le monde de l’Art.
Cela la coda de Endless forgetting le révèle quand l’échelle du plan se fait portrait du coureur en
homme affublé d’un masque d’âne. Il s’avère de même que celui qui porte ce déguisement est l’artiste en
parfait performer. Sans effets spectaculaires, il revient à la raison d’être de la vidéo, provoquer son
espace, là, ouvrir un espace là, pour celui qui suit la course… des yeux… Courir, c’est faire de l’espace,
sans autre nécessité que la course qui anime cet espace.
Simone Dompeyre
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