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Maximilian SCHMITZER
going in circles
Ce dernier film s’y impose tant il trace le chemin circulaire métaphorique de cette relation des hommes et
des femmes entre eux, au-delà de leur statut social. Godard a cerné la perspicacité de ce point de vue en
distinguant en Ophuls : “un cinéaste qui joue avec la difficulté et gagne à chaque coup de dé, en
abolissant le hasard mallarméen”.
Going in Circles préfère revenir à Kubrick - Shining est retenu par trois fois - y compris par la référence que
ce réalisateur fit du Troisième homme, lors d’une interview... à savoir que Lime - rôle tenu par Orson
Welles - auquel son ancien ami veut faire avouer son ignoble trafic de pénicilline - dit que du haut de la
roue, les hommes ne sont rien de plus que des insectes qui ne provoquent pas de pitié.
Maximilian Schmitzer le fait très explicitement car le film se double d’une réflexion sur ce qui
l’anime. La boucle est complète : le footage n’est ni ornementatif, ni jeu gratuit. Le film n’est pas une varia-
tion vide sur une figure. Une voix over féminine commente ses choix et expose le projet en y intégrant
jusqu’aux paroles d’un chanteur de variétés sur la valse qui rassemble tout un chacun quelle que soit sa
classe sociale. Le film se fait politique.
Le commentaire associé à la valse ne la décrit pas davantage en termes de chorégraphie, mais
revient à son origine qu’il n’hésite pas à qualifier de révolutionnaire, en la comparant aux danses
macabres médiévales puisqu’alors tous y participaient quel que fût leur statut. En la considérant comme le
rock du XVIIIème siècle, tant son rythme bousculait les habitudes, il explique ce caractère subversif parce
que le tour s’opère inversement au sens des aiguilles d’une montre, et parce que les corps portés dans ce
tournoiement, dépassaient leurs limites humaines, en adoptant la trajectoire des corps célestes.
Désormais à Vienne, cela se danse fleurs à la main, tête penchée dans la pure tradition des bals
princiers, la figure n’effraierait, voire ne terrifierait, qu’associée à l’image d’une obsession criminelle à la
“shining/brillant” en comprenant que le terme se lit en antiphrase… mais elle peut s’apprécier dans le
mouvement perpétuel de la création de sens, par montage en ricochets, sémantique ou musical.
Simone Dompeyre
Installations / Expositions - Histoire(s) 129