Page 129 - catalogue_2013
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Arnaud SEGOND
Exil(s)
Exil(s) s’entend au double sens de l’espagnol “entender” - comprendre et entendre - dont
l’installation ranime l’histoire, celle d’émigrés venus vivre dans le bassin de Decazeville.
Il revient aux motivations de leur venue, immigration économique, exil politique, ainsi qu’à l’intégration qu’il
pense très/trop oublieuse. Le titre alternant indissociablement le singulier et le pluriel guide la lecture vers
l’exil de soi-même à soi-même.
Un mur couvert de miroir et creusé de trois loges où se diffusent trois images vidéo, forme le
fond de l’espace fermé/non fermé par deux pans de tissus transparents légers où se projettent l’histoire
de la mine, l’histoire du travail, la déambulation d’une jeune fille.
Le triptyque interne se consacre aux organes de sens : œil, oreille, bouche. En très gros plans, fixes, ils
figurent l’appréhension de ce passé ; l’âge diffère, dénotés par les rides ou le lisse de la joue ou du contour
des lèvres ; hommes, femmes se succèdent selon la synecdoque des traits ou une trace de barbe rasée.
L’œil se meut plus ou moins particularisant celui/celle qui devient emblématique des exilés. Arnaud
Segond y perçoit une appréhension en perte. Il en questionne la frêle vivacité ou en regrette la légèreté.
Calmement, sans tonitruance, Exil(s) lance des signes comme autant de petits cailloux pour retrouver le
chemin d’où l’on vient.
Cette polyvision se double de deux projections sur les parois flottantes qui se doublent ainsi
elles-mêmes, en débordant leur fonction de témoignage. Sur la seconde, l’histoire de l’usine, y compris les
moments de lutte ouvrière avec le visage d'un mineur en révolte, mais, avec, en sa fin, la lecture d’un texte
espagnol à teneur poétique par une femme dont l’accent tend l’habitude de parler en français.
Sur la première, en surimpression, des papiers d’identité de l’origine et autres signes de ce passé,
perturbent le paysage frayé, lors de la promenade dans la forêt, de la jeune fille, qui emprunte plus tard
d’autres chemins dans le village et le cimetière, la bande son ajoute une autre strate à cette géographie
personnelle, par des paroles en occitan.
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