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Estelle VERNAY
Texas chainsaw massacre
Chère E,
je me suis longuement questionné sur la manière d'aborder Texas chainsaw massacre installé
dans la Chapelle des Carmélites, et, au final, je me suis rendu compte à quel point le verbe “monter”
recouvrait une multiplicité de sens dans ton travail vidéo.
Il y a tout d'abord, l'acte premier de “monter” ces images du film de Marcus Nispel, Massacre à la
tronçonneuse datant de 2001. Tu tronçonnes littéralement l'action et seuls les espaces du film résistent au
montage, en subsiste un paysage de campagne américaine délaissée.
En démontant la construction narrative du film tu remontes un décor. “Monter” un décor, c'est
donner naissance à un paysage de fiction. Malgré tout, le lieu du dit massacre conserve une apparence
angoissante, en suspens. Texas chainsaw massacre me fait penser aux tableaux naturalistes de Thomas
Cole où la paisible campagne américaine, bien que très fidèlement représentée, revêt toujours un aspect
inquiétant. En créant cette vidéo, tu montes une histoire de regard. Notre œil observateur, rapace
chasseur, scrute ainsi le paysage dans l'attente, inespérée, d'un dénouement.
“Monter” n'est-ce finalement pas s'élever, prendre de la hauteur pour mieux observer le monde
qui nous entoure à l'image de Sainte Thérèse d'Avila s'élevant dans le ciel bleu peint sur le plafond de la
Chapelle des Carmélites ? Qu'en penses-tu ?
Bien à toi, S. (Sylvain Auburgan)
Ps : “La caméra est l'œil d'un vautour au-dessus d'une région située dans les faubourgs d'une ville mexi-
caine, une région de détritus, de moellons et de bâtiments inachevés.”
William S. Burroughs, Les garçons sauvages, 1970.
Photo in situ : Céline Canton Installations / Expositions - Histoire(s)
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