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                                 Clio SIMON

                                              A la Chapelle des Carmélites
                                                    Le Bruissement de la parole

          Ce film dresse le portrait d'un lieu particulier : l'aride désert d'Atacama au Chili et plus précisé-
ment le sommet des petites collines situées face à l'Océan Pacifique.
Chaque matin, ces sommets sont baignés dans une épaisse brume côtière qui s'élève de l'océan. Les
pêcheurs de cette région ont tendu de grands filets noirs rectangulaires qui, à l'approche de la brume,
accrochent ses gouttelettes. Celles-ci circulent le long des mailles, puis d'un tuyau, pour atteindre une
petite citerne. Ce système avait pour objectif de recueillir de l'eau potable, mais après analyse de
cette récolte on a relevé la présence de produits chimique témoignant de la pollution ambiante, les
filets sont aujourd'hui des témoins.

         Ce film convoque métaphoriquement l'Histoire du Chili, un pays dont l'Histoire passée ne passe
toujours pas : une constitution datée de la Dictature toujours inchangée et axée sur la privatisation, la pri-
vatisation des mines de cuivre dont le système défaillant engendre une pollution extrême dans le désert
d'Atacama, les « Disparus » de la Dictature enterrés dans ce même désert qui, aujourd’hui, est fouillé par
le regard à la recherche de preuves...

        Le personnage principal de ce film est le Nuage. Utilisé comme motif, il se réfère à de nombreux
événements : guerre, explosion, accident sismique... Le Nuage reste indéterminé et donc indéfiniment
appropriable, aussi bien matériellement que conceptuellement. Pour ce film, j'ai pris pour partition le
récit des « Paroles gelées » de Rabelais. Paroles emprisonnées et préservées par les frimas, seul le
réchauffement du climat les rendra soudainement à la vie, les restituant à l'ouïe comme pure matière sono-
re. Comme sortis du néant, les bruits d'une bataille oubliée écloront sans que rien en apparence ne soit
pourtant visible.

          Il ne s'agit pas ici d'un travail « sur » la mémoire mais d'un projet « travaillé par » la mémoire
avec tout ce que cela induit de fiction, le souvenir est tronqué, altéré, incertain. L'acte de mémoire est ici
reconstitution, source de bégaiement et d'interprétation. » C.S.

Composition sonore : Claudio Merlet - Avec le soutien de la Mairie de Paris – Département de l’Art dans la Ville.  133
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