Page 28 - catalogue 2017
P. 28
Projections 1. isdaT
Valentine SIBONI, See the sea of unreachability, 10min30 (HEAR, Belg.)
La « Rückenfgur », littéralement « la fgure de dos » est un motif des
plus fréquents del’œuvre de C.D. Friedrich. Ce peintre inclut dans
le paysage, le spectateur de celui-ci, ainsi l’image témoignerait de
l’impossibilité romantique de représenter le monde. Jamais dans
le travail de Valentine Siboni, une référence n’est de l’ordre du
vernis culturel car elle est portée par un projet plasticien de sens
artistique.
Le titre embarque en ajoutant le jeu de l’homophonie au terme
anglais, jusque-là réservé au domaine informatique et que le
français traduit par « inaccessibilité ». Celle de saisir les deux côtés
de l’horizon.
Valentine Siboni choisit le maître en peinture de l’inclusion du regardeur dans le champ, Friedrich qui comprit que
n’existe de paysage que vu par... mais, dans ses variations virtuoses, elle fait danser plans de flms, photographies
et tableaux selon un processus proche du folioscope dont une main de synthèse détache, paradoxalement, image
par image.
Par là, elle rappelle le statut d’image y compris celles qu’elle réalise elle-même pour ce rappel; ainsi tel plan de
paysage de campagne se réduit, perd de sa saturation du champ en un passage exhibé à la numérisation, sa
réduction de format et l’écho de son usage écranique.
Paysages en divers médiums et de divers artistes puisqu’outre plusieurs Friedrich, un Dali, un Munch, Dücker,
outre des peintures et une gravure, de nombreux flms aussi diférents que Jane Eyre de Fukunaja, le Rebecca
d’Hitchcock, Nosferatu de Herzog mais d’autres encore Maddin, Stevens, tous en cartes postales. Les paysages
flmés reprennent ou non ceux ainsi cités : Etretat ou la falaise de craie blanche de Rügen, la Suède et Copenhague.
Un pont numérique sur une mer de synthèse mène de l’un à l’autre, dans les seuils - initial et fnal - et avant le
second « monologue » annoncé par titrage interne, puisque le flm interroge aussi l’image calculée. Cependant, un
magma de non formes mouvantes n’y répond pas davantage à la vision simultanée des deux pôles, alors que la
parole s’entend étoufée, elle aussi, par le transfert numérique.
Cependant paysages enchâssés ou flmés, chacun intègre un regardeur, son horizon est toujours déjà attribué à
ce regardeur désormais partie intégrante de ce qu’il voit. Ceux intégrés au flm enchâssant répondent en dialogue
ou provoquent des commentaires: « l’horizon est une image toujours vide constamment remplie par toi et moi » /
« obstacle prêt à être avalé par cet espace cadré ». Ces voix y voguent sur la réfexion poético-scientifque induite
par les questions du « Néophyte ». De même en graphie manuscrite ou non, s’en réitère le discours: « image fait
image fait image »... ou défnition du paysage et de l’horizon: « Le paysage est le réel cadré de celui qui le contemple
/ L’horizon est l’œil du paysage ». Si le paysage en est exclu, c’est la machine qui y supplée : une caméra Super 8
face à un écran, écran sur-encadré dans le champ d’une mer, avant qu’il ne devienne paysage grâce à un travelling
avant qui agrandit le plan de mer. Il répond au travelling arrière qui avait découvert cet écran. Le mode de faire
l’image est intégré à la question de ses « compétences ».
Si la question anime Valentine Siboni, elle est mue, aussi, par le désir, toujours déjà recommencé, de l’image en
mouvement, et celui-ci la guide à ré-animer telle image de Rebecca, fgée en carte postale et Rebecca devant la
mer, se tourne et revient à la mer, se tourne et…
Simone Dompeyre
Aleksandra SZMIDA, Unwanted Desires, 4min (All.)
Unwanted Desires monte de courtes scènes à la préoccupation
commune : les comportements incongrus. Souvent très éloignés
des normes sociales, parfois dangereux et écœurants quand ils
ne sont pas incompréhensibles. Cependant, comme certains sont
illicites, la tentation de revenir aux limites d’un comportement plus
approprié et reconnu devient habituelle. Comme un journal intime,
un carnet de notes, la vidéo collecte des mauvaises pensées jamais
mises en œuvre.
26