Page 143 - Catalogue_Traverse Vidéo_2018
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Musée des Abattoirs Projections
intime ni un extime ; un corps expulsé de son morphē ; un corps donc qui ek-siste
dans son ek-stase/l’être-hors-de-soi.
Antoniy Valchev
Alice Angeletti, RA MENADA – Procession of ghosts
9min | aug&ohr medien, Italie
Le philtre est vocal autant qu’iconique, mieux leur
interaction provoque un envoûtement dont on ne
saurait/voudrait s’extraire alors même que l’on s’évertue
à trouver le fil du propos à deux voix.
Le titre ne mène qu’à la perplexité, qu’y lire : le dieu
égyptien du soleil, la prêtresse de Bacchus, le terme
espagnol du troupeau, la ménade grecque ou un
signifiant ésotérique que la traduction désarmerait en rendant possible sinon habituelle
la Procession de fantômes. Il adhère parfaitement et augure de ce qui a lieu/non lieu
selon les plans aux bords légèrement arrondis du Super 8, au halo des paysages
grisés, au mouvement lent des mouvements opérés par la caméra légère. Elle bouge
comme en quête des limites du lieu mais comme subrepticement.
Les deux voix homme et jeune femme font duo s’écoutant, se répondant, sachant
l’un de l’autre ce qu’il attend, espère voire pense. Un effet du hors cadre ajoute au
déplacement en terrain sinon mystique du moins éloigné de la quotidienneté, en effet,
le générique dénomme un Orfeo parlant à une Alice/la réalisatrice. Loin d’y projeter
une naïve lecture et de plonger en un automatisme de la relation d’un prénom à la
personne, se plaire à cette rencontre ; le réel du nom adhère à cette sensation d’être
conduit/e, enchanté/e.
Ces voix over conduisent avec la tranquille connaissance dans cet ultra-monde qui
ressemble au nôtre que ce soit depuis derrière la fenêtre aux mouches, alors la main
écarte les doigts et descend hors du champ ou en extérieur, face aux rochers aux
formes tourmentées, hauts comme des colonnes, masses avec redents. Comme
suivant la démarche du promeneur, la localisation varie, campagne, mer qui se dévoile
au loin en profondeur du champ ou proche comme plage avec rocs. Le temps est
à la lune, comme point brillant si haut, sans bruit ; l’italien prête sa musique à cet
accompagnement.
Tout est proche et différent car ouvert à un autre réel. En glissando, la figure d’un
autre âge se découvre entre les pans du rideau de la fenêtre : le bonnet enfoncé
blanc, le vêtement au décolleté rond, le visage même signent les années révolues
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