Page 45 - Catalogue_Traverse Vidéo_2018
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Cinémathèque de Toulouse Projections
avec la corde dont on pend le
méchant dans ce genre à colt et
chevaux. Il implique la manière
de faire film en déroulant un fil.
Le film, boutade heureuse,
prouve un excellent maniement
de l’arme choisie : le fil qui jamais n’est perdu de plan à plan. Les motifs ramènent au
western, plus précisément à celui qualifié de spaghetti, même s’il fut européen et non
seulement italien, parce que Sergio Leone en fut le chantre absolu. Les sons topiques
suffisent à provoquer l’attente des scènes canoniques voire à les remplacer.
Le duel oppose deux protagonistes très semblables en silhouette, en actes et
mimiques. Il en reprend la figure burinée et mal rasée, la cigarette mâchonnée
est remplacée, comme chez Lucky Lucke, cette fois, par une allumette tout aussi
mordillée. La flamme rouge sortant du canon du colt atteste de la violence du coup.
La variation des plans épouse celle de Leone, de la localisation dans la rue désertée
alors que sonne la cloche de l’église, au gros plan descriptif de l’homme, de l’arme
comme au très gros plan de la balle. Et pour le bonheur de l’amoureux du western,
la laine devient cette autre icône : le petit buisson sphérique dont le mouvement
s’oppose à la concentration des deux rivaux immobiles face à face. Le virevoltant ou
« herbe qui tourne » si l’on traduit littéralement « tumbleweed » adhère si étroitement
au western que l’un – de Nathan Juran – le prit pour titre en 1953 et High Wool en
encadre son tissage filmique.
En suivi de tissage, le film suivant s’empare de la figure d’une personnalité bien réelle,
Kinski or celui-là tient un rôle dans le film germano-autrichien coproduit en France,
réalisé par Rolf Olsen et qui précédait, en 1963, le premier western de Sergio Leone :
La Chevauchée vers Santa Cruz.
Et après l’emportement de cette herbe en boule par le vent, ne demeure au sol
que la pelote de laine, résultant de la mort des deux hommes. Ils tirèrent la balle et
simultanément le fil de leur vie.
La pelote est aussi ce qui a tissé le fil narratif en haute animation : les sens se
rejoignent, métaphoriques et indissociables.
Simone Dompeyre
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