Page 57 - Catalogue_Traverse Vidéo_2018
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isdaT Projections
se suivent linéairement mais de façon irritante parce que les espaces incomplets se
séparent, s’éloignent les uns des autres, comme s’ils ne pouvaient plus être complets
ni bâtis ensemble, ni parvenir aux souvenirs ou aux histoires. Les lieux de l’enfance
s’éprouvent étrangement froids et sans nécessité d’être. Ces lieux, ces espaces
n’accordent qu’une référence fugace aux habitations et aux paysages, comme si les
souvenirs avaient perdu le fondement de leurs histoires.
Par ailleurs, le titre fait référence aux nuages de données dans lesquels nous stockons,
nous confions nos souvenirs. Données qui peuvent être partiellement supprimées
comme perdues ou manipulées. Le film dans le film l’exprime : est-ce encore notre
propre mémoire qui se perçoit ou simplement un film composé de fragments que
nous regardons ?
Cf. Suzanne Wiegner et Traverse Vidéo nourrissent une fidélité affectueuse et réciproque et des textes des
catalogues de 2012 (p. 108), 2013 (p. 135), 2014 (p. 154), 2015 (p. 45), 2017 (p. 120, p. 125) disent le
plaisir de ce « motif » de la mise en abyme maniée par l’artiste, appréciée par Traverse, qui entrelace les
questions de la mémoire et de l’écriture numérique, très souvent en bande de Möbius.
Susanne Weigner / Simone Dompeyre
Melanie Menard, Disciplinary Institutions
6min51 | Angleterre
Melanie Menard pense en photographie et en films. Son regard est porté par des
préoccupations d’Humaine. Elle sait et rappelle que nous sommes des êtres de la
mémoire et d’Histoire et que nous nous devons d’exercer la première pour l’autre.
Elle entraîne en des déambulations très
dirigées, en perspectives calculées,
en travelling épousant le plafond pour
revenir au sol, en zoom déictique vers
les décombres de diverses maisons
mais partageant d’identiques raisons
d’être et les architectures. Des
lieux « disciplinaires » de contention
dont une énorme clef découverte
dans un entassement de papier est
emblématique, dont l’impasse s’avère la seule non-issue des couloirs aux portes
fermées alors que les hauts murs et les fréquents barreaux déclenchent le motif de
l’angoisse.
Le film va à la trace ; sans davantage de commentaire, il ausculte les murs lépreux, les
tapisseries en lambeaux et intègre la découverte-irruption d’un étage plus « noble »
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