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VIDÉOS ET FILMS D’ICI ET D’AILLEURS

                                                       Benjamin BEGEY, Sablier, 7min, FR                                      15

                                                                     Sablier comme un verbe à l’infinitif. Dans cette chute
                                                       ascensionnelle, les repères spatiaux et la pesanteur se perdent dans
                                                       une spirale dédiée au plaisir du mouvement. Ma mère descendant
                                                       l’escalier. Le simple transvasement de son poids donne le tempo, de
                                                       marche en marche, d’une touche à l’autre d’un clavier infiniment gi-
                                                       gantesque. Une allure de personnage mythique traverse les salons
                                                       de l’Opéra, vivant la dramaturgie du temps qui passe dans une boucle
                                                       de moments prestigieux. Risque en corps léger, défi à la gravité, une
    chute devient danse quand cela se fait sur les marches des escaliers de l’opéra.

    Om BORI, 3,267 footsteps, 13min 33, HUN

                  « Dans ce travail, je déploie un algorithme pour une ima-
    gerie stéréoscopique de la rue afin de tracer mon trajet quotidien entre
    ma maison, mon école et le logement de ma grand-mère dans la ville
    de Budapest. Les 3267 pas de mon itinéraire sont quantifiés en 2100
    images, assemblées en une animation 3D qui suit mon parcours en
    perspective et ce moment de ma vie quotidienne. Cependant, à la
    suite de problèmes liés à la technologie, la plupart des phénomènes
    éphémères s’effacent au cours du traitement numérique. Ainsi, cap-
    turée, la vie se réduit aux coordonnées calculables du mobilier urbain et des éléments inanimés. Pourtant, ce qui
    échappe à cette capture rôde toujours sous forme de taches blanches, de teintes pâles et de silhouettes fantoma-
    tiques. Des lors, un monde se recrée, oscillant entre les images à haute résolution, les formes désintégrées et les
    transformations aléatoires. De telles résultantes des datafied contrastent avec le récit intime des expériences vécues
    et avec les souvenirs évoqués par la perspective que je suis quotidiennement. »

                  En demeurent une fantasmagorie débordant la fonction de reflet de la vidéo, une entrée en un monde
    de fluctuations colorées, une fascinante accroche de ce plan subjectif.

                                                                                  Om BORI
                                                                         Traduction : Simone Dompeyre

    Samuel BESTER, Analogia, 19min et Il ne s’agit pas, 3min 19, FR

                  Voir une vidéo de Samuel Bester bouscule de nombreuses connexions neuronales… la hachure, le
    mouvement entrecoupé, le mouvement accéléré de non-image provoquent l’œil et l’esprit. On y cherche l’analogie
    avec le pacte de lecture dont est chargé le titre, qui paraît se jouer de nous puisque Analogia.
    Le français se calque sur le mot latin signifié comme signifiant : la ressemblance ou la conformité de divers éléments.
    Ainsi l’image analogique reproduit-elle le signal à enregistrer -audio, vidéo- sous une forme similaire au référent sur
    un support; le signal audio sur la bande suit les mêmes amplitudes que l’onde sonore, même si avec plus ou moins
    de fidélité.

                  Analogia compose une partition de dérangement de cette ressemblance : elle s’emballe en distorsion,
    scintillement, bruit de fond, pleurage. Le tremblement saisit le champ, la trame; le trait se conjugue en verticales,
    horizontales, sinusoïdes, quand le noir total n’est pas remplacé par la neige télévisuelle et son bruitage carac-
    téristique… la trace référentielle est malmenée. Dès l’incipit, un défi est lancé au voir ainsi que le refus de toute
    localisation; pour assurer la non-exposition d’un non-récit, le recadrage y est immédiat, avant un surcadrage sur des
    feuillages au loin et une montagne floue. Des voitures ne sont pas plutôt dans le champ qu’un filage entraîne les
    toits avant une plongée et la dissolution de toute chose. La variation suivante part sans motivation avancée du très
    gros plan d’une main masculine à un plan rapproché, en intérieur, d’une plante en pot peu précisée et attaquée par
    les points, pour s’achever en un rien-image, avant la surimpression d’éléments ou l’accéléré d’insectes ou un zoom
    avant hâtif… Le désir de reconnaître y est à nouveau pris en flagrant désir quand des bribes de plan d’un bureau,
    qui s’avère salle de montage, sont elles-mêmes annulées par une mise en abyme de cadres de guingois, avant un
    flicker agressant l’œil puis l’abstraction. Le sentiment de réalité que nous entretenons avec le monde perceptif, par
    la persuasion de l’image est contrecarré.

CINÉMA EXPÉRIMENTAL -ART VIDÉO- MONOBANDES

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