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Installations Traverse Vidéo 2016 - L’atypique trouble 127


Clare LANGAN, State of suspension, 6 : 30 min, Irl., Irish Shorts
L’inversion du registre du quotidien provoque une adhésion non pensée parce qu’hypnotique : les gouttes
rondes et pleines s’ébranlent depuis le plafond, en ouverture et remontent ; le corps fotte en fragment,
quand le très gros plan distingue, ici, tel membre, là, le visage yeux fermés jusqu’à leur ouverture et là,
un oeil en plan frontal. Toute motivation narrative est annulée par le projet haptique ; par le projet de
partage de l’impression, de la sensation. L’état de suspension déclaré, outre la description du corps et
des éléments, est aussi celui de nos repères comme de notre raison.
Le sans lieu impose sa tonalité ambiante. Une obscurité brillante interstellaire répond au léger, à l’aérien
liquide et glisse parfois en fondu au noir jusqu’à la non image. Le temps est raccordé au temps ponctué
d’images impromptues, dans ce sans fond - plan d’une assiette débordant d’eau, plan d’une bouteille
couchée avec le son topique du liquide versé, enrobé de musique planante, elle-même mêlée de sons
cristallins ou d’orages ténus. Alors le corps revient, se retournant sans effort dans cette a-pesanteur,
dans ce bonheur du sans poids, du sans nécessité et les gouttelettes se font clarté.
Simone D

L’artiste écrit :
« En une méditation sur la perte, Etat de suspension explore la fragilité de la condition humaine,
retenue quelque part entre la vie et la mort. Porté par une musique originale du compositeur irlandais/
allemand Jürgen Simpson, le flm tourné en caméra grande vitesse, examine directement les aspects
fondamentaux de la matière physique et du temps alors qu’un corps et l’eau défent les lois de la gravité.
L’œuvre s’intéresse à la fragilité humaine en relation avec la nature mais sa caméra s’était jusque-là
focalisée sur l’environnement alors que le motif de State of Suspension inaugure une nouvelle phase
dans son œuvre.
Son point de vue privilégie, en effet, le corps humain lui-même y interrogeant notre existence, notre
mort et leur entre-deux, dans le refus d’une distinction claire entre le rêve et la réalité. L’espace ainsi
créé devient un monde de submersion : une femme fotte dans les airs, lévite suggérant la transition
d’un monde à l’autre. Des fashes de ce qui peut être la mémoire surgissent dans l’espace où vogue
la femme. La pluie monte vers le haut et imprègne l’espace total. »


























- 7. Prép’art / Decazeville-
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