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Projection au Gaumont Wilson




David FINKELSTEIN, Display Devices, 25', 2005
Si l’on traduit le titre : Dispositifs d'affichage, on y saisit le protocole
de cette oeuvre, mais on ne peut présager de l’univers inventé de
diverses couches référentielles, performative - la vidéo se nourrit
d’une performance de David Finkelstein, le réalisateur lui-même et
de James Martin - et numérique, aux couleurs déréalisantes.
De petits rectangles de couleur nette se combinent en image pour
« afficher », énoncer des messages codés du «genre/ gender », de
la philosophie ainsi que d’urgentes visions personnelles. Des paons
mâles exhibent leurs plumes, des guerriers arborent leur coiffe de guerre, Carmen Miranda s’extrait elle-
même d’un chapeau en forme de fruit, des gaufrettes au chocolat fondent dans des tasses de chocolat ;
cela sur un standard musical alors que de constants changements de la perspective entraîne le specta-
teur dans un vol vertigineux à travers un tel espace étrange.
Réalisé dans un lieu au nom programmatique : le lac de performance du Groupe Ivan, l’univers pixélisé
provoque ainsi le plaisir simple de ce mouvement quelque peu saccadé, sur des airs à la Laurie Anderson
mêlé aux questions d’être ce que l’on est.
“ Mon intention n'est pas de créer une expérience douloureuse qui provoquerait la colère, ou perturberait
le public, au contraire, ma vidéo est censée produire une expérience divertissante et agréable. Certes si
l’on s'attend à une histoire, à des personnages cohérents, à une lecture ou à tout autre type de construc-
tion intellectuelle clairs, on éprouvera de la douleur, de l'irritation voire de la colère, parce que le désir aura
été continuellement frustré. La vidéo ne suit ni thèmes récurrents, ni scénario et ce, parce qu’elle est
conçue pour encourager à apprendre à regarder différemment en profitant de l'écoulement du rythme, des
émotions, et du dynamisme plus que des idées. Il faut la regarder ainsi qu’on écoute la musique.”
Simone Dompeyre



L’improvisation est fondamentale au travail de David Finkelstein.
“L’objectif sur lequel doit se concentrer un performeur improvisateur n’est pas ce qu’il essaie de
communiquer au public, mais ce que lui ressent. Parce que ce qu’il ressent est la source même de la
performance. Et ces sensations, il doit les vivres physiologiquement. Si l’acteur sent dans son corps, le
public le verra. S’il sent dans sa voix, le public l’entendra.”

Il en induit le concept de saturation selon lequel le performeur tel une éponge s’emplit constamment, et de
plus en plus pleinement, de l'état affectif de la pièce qu'il actue. Sans que cela signifie une accumulation
émotionnelle, ou que le performeur ait à jouer de plus en plus fort ou de plus en plus vite. A chaque
souffle, à chaque phrase, à chaque moment, les énergies sont expérimentées dans leur intégralité, sans
que soient jugés leur faiblesse ou leur grandeur, leur enthousiasme ou leur impassibilité.
“Toute improvisation réussie se doit de porter en elle un sentiment de connectivité, de ses premiers
mouvements, jusqu’aux derniers : c'est-à-dire qu’elle doit donner le sentiment que, dans une sensation
organique, pleinement vécue et directement ressentie, chaque instant de la représentation devient le
prochain, qui devient lui-même le suivant, etc.”

Display Devices prouve l'efficacité de cette technique d’improvisation et cela fonctionne y compris dans la
pièce vidéographique, qui rallie le spectateur, l'entraînant dans ses émois, et se vivant dans son
immédiateté.
Sandrine Skellie




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