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Projection au Gaumont Wilson
Le regard de Yusef Sayed sur Johanna Vaude - Large angle
Johanna VAUDE, Beyond fiction, 5'40, 2011 Johanna VAUDE, Color shoot, 7', 2011
Johanna VAUDE, I turn home, 5'28, 2011 Johanna VAUDE, Inner Stranger, 5’, 2011
La relation entre l'oeil et l'écran, entre la vision et la sensation, entre le contenu audiovisuel que
nous expérimentons et les idées qu’il provoque s’étend bien au-delà du médium cinéma, et est exploré
dans les films de Johanna Vaude contenus dans l’édition DVD « Hybride ».
Edité par le label de films expérimentaux Lowave, le dvd rassemble six films, réalisés de 1998 à
2006, et constitue une contrepartie essentielle à son travail plus récent qui a été diffusé en ligne,
disponible en téléchargement et où se confirme une artiste exemplaire.
Vaude établit des intersections entre les expérimentations plastiques de Stan Brakhage et le
montage radical des cinéastes français et soviétiques des années 1920, ainsi que le cinéma d'action de
Hong Kong des années 90 ; entre Hollywood et les images de télévision ; entre embarcations artisanales
et remix numérique; la réalisatrice crée des oeuvres d'art qui frappent l'oeil avec une force particulière.
Ce travail d’hybridation reflète une vaste connaissance de l'histoire du cinéma ; englobant à la
fois l'industrie du film et l'avant-garde, elle absorbe une large gamme de techniques expérimentales, ainsi
que de préoccupations thématiques, déjà explorées auparavant par d’autres cinéastes. Cependant, elle
trouve des techniques spécifiques dans lesquelles les références intertextuelles peuvent agir avec
diverses stratégies multimédias, peut-être incomparables en termes de quantité de ressources plastiques
d’où elles sont tirées.
Elle allie en toute confiance peinture, Super 8, images détournées, effets chimiques, images
d’Internet, cinéma scientifique et bien plus. Ses images évoquent la mémoire et le mythe, provoquent la
rêverie et l'inconfort, dans des films qui, souvent, se dévoilent dans des dimensions innomées.
Le spectateur rencontre souvent des visions aux nuances abstraites et sensuelles, des images oniriques,
ainsi que des frictions de textures, où chaque photogramme est habilement réalisé avec assurance et
instinct. Par ailleurs, les images sont souvent familières, mais renouvelées grâce au nouveau contexte, à
l'intervention technique et à la sensibilité créative de Johanna Vaude.
Notre Icare est troublant au début. Une rapide succession d'images télévisées exhibent les
horreurs innombrables du monde entier ; images que regarde également un personnage masculin inclus
dans le champ. Le montage tourmenté de Vaude provoque d’innombrables chocs, jusqu'à ce que le film
soit surchargé, écrasant et accablant. La vitesse du montage ne cache rien, mais prouve que sa rapidité
d’exécution n’aboutit pas forcément à une éradication de clarté. Pour Vaude, l'objectif est d'attirer
l'attention sur l’utilisation des images de violence réelle et de mort au sein de l'industrie des médias et du
divertissement, et de nous inciter à envisager comment réagir.
Cinéma expérimental, art vidéo, monobandes - Faut Voir 41