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Traverse projette aux Abattoirs
Denis de Lapparent, Toto § Chick, 3,44min, Pise Tower,
2,23 min
« Montrer quelque chose de simple qui casse toutes les
démonstrations et le montrer le plus simplement possible". Telle
pourrait s’énoncer la démarche de Denis de Lapparent, discrète
et persévérante. «Démonstrations» s’entendant ici comme mots
d’ordre, clichés, injonctions, normes, projets concertés, idéaux
démocratiques, etc.
Denis de Lapparent développe un art potache, artisanal
et d’une efficacité déconcertante. De livre en livre, image et
texte se cherchent sans cesse des noises, dans des chassés
croisés permanents sans queue ni tête mais hautement prémé-
dités et construits patiemment bloc par bloc : texte et image y deviennent de plus en plus indiscernables.
Les mots et les choses ne tiennent plus, ni debout, ni à plat : ils se tordent de rire. Se dessine alors en
quelques traits le constat assuré de l’effondrement des représentations par leurs illustrations même. »
Lisant ce commentaire sur un livre de Denis de Lapparent, l’envie de faire savoir qu’il déroge
quel que soit le genre qu’il emprunte, en y important son humour ravageur, s’est imposée, ses vidéos
cocasses et coriaces ramenant à penser à ce que le quotidien efface si rapidement.
Sébastien Laudenbach, La Force, 12,42min
La liberté animée
La force est celle du dessin qui n’est plus dans l’arrêt…
Le film emporte constamment ce pour quoi il se fait. Il ne pro-
voque pas le mouvement en se cachant, il porte à vue son
processus pictural/ son processus d’existence filmique. Il
est dans la rencontre sans faille entre le projet et son écriture. De quoi ressortir la définition du signe
comme entrelacement indispensable entre la trace visible, tactile, perceptible et l’idée ainsi exprimée.
Le dessin ou plutôt la peinture - si l’on s’attache à ces figures sans contour, nées de coups de couleur,
faites/ défaites aussitôt sur un espace lui-même désobéissant aux obligations de l’encadrement- s’im-
pose comme le médium de l’existence des pensées de Clémence et, dès lors, de l’existence de
Clémence.
Or Clémence qui peine à vivre engluée dans des souvenirs de maltraitance, de mal amour, a du mal à quit-
ter son lit de draps pour se faire être, se retrouver dans le lit humide de la rivière.
Puisque ce sont ses mouvements intérieurs, les images bousculent la temporalité, elle trace sa
vie : enfance et saut à la corde ou balançoire ou lecture de livre avec images / sommeil-réveil dans la
chambre adulte et objet du quotidien / passé encore présent, resurgissant en houle, transformant le sou-
venir en cauchemar quand surgit la mère en lionne rugissante, dévorante avec des accalmies de joue
léchée par l’animal / ce passé contaminant le futur en jetant des cadavres dévorés par des corbeaux
envoyés par la lionne-mère…
Les méandres de la pensée constituant Clémence se tracent l’un de l’autre ; jamais le motif inter-
ne au plan n’est calme ; chaque plan disloquant ses composants fournit le matériau du composant
suivant. La courbe orange s’élevant sur une verticale devient écureuil devant les yeux heureux de
la fillette aux cheveux du même roux. Son visage à elle, simple rond, s’avère le soleil au plan sui-
vant. Tel trait noir se mouvant devient oiseau.
32 Cinéma expérimental, art vidéo, monobandes - Processus