Page 182 - Catalogue_Traverse Vidéo_2018
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Installations Prép’Art
simultanément les trois pans, inversement ils invitent à se focaliser sur leur contraire :
la mer élémentaire et la mer lieu de la nage d’hommes, de femmes, d’adolescentes,
totalement habillée d’une combinaison à fleurs ou en tee-shirt et pantalon ou en
maillot de bain, ce qui suffit à localiser diversement ces femmes. Tunis et Marseille
sont les ports que les deux artistes ont élus pour leur métaphore de l’impossibilité de
dire.
La mer jette sa houle, agite quelques algues, avance et recule sans précision ; elle
pourrait retenir sa connotation de lieu matriciel ou du moins de passage. Figure du
mouvement, elle s’avère arrêt de, lieu d’interdit avec quelques éclats du passage réussi.
Les visages, en effet, ne sont pas souriants ; le plus souvent, ils grimacent à travers
les bulles de la respiration, halètent, suffoquent avec ou sans bâillon significatif de la
censure. Les mots se brouillent mais la tentative se réitère, jamais elle ne s’arrête.
L’homme perd pied mais il croise les bras faisant signe de ses doigts pointés.
Dès lors, la construction des motifs décoratifs guide vers l’espoir de prendre la mer
comme espace de liberté et de plaisir ; dès lors, on saisit le passage du visage en
gros plan de cette jeune femme aux longs cheveux blonds, à sa duplication en deux
puis quatre puis huit puis… l’échelle l’amenuisant. Un carré aux côtés peu rectilignes
s’instaure alors que le visage en symétrie adopte la déformation de l’effet papillon. Le
visage d’un homme se multiplie en hiatus de part et d’autre d’un croisement marqué,
ses bras forment des zigs-zags successifs jusqu’à la frise ; telle autre personne brune
cheveux tressés passe en images circulaires aux bords perturbés ; telle autre en
losange flanqué de cercles ou c’est l’image d’un objectif qui tourne sur lui-même.
Le bonheur du faire et de la réaction transforme l’opprimé en acteur de la liberté.
Simone Dompeyre
Dounia Ismaïl, 3x2 : rose, bleu, jaune
3min37 | France
Non un abécédaire-vidéo qui énumèrerait dans l’ordre de
leur initiale des objets, leur inventant des scènes et créant
des échos dans leur succession. Non un journal-vidéo
des actions quotidiennes que l’artiste ferait (les actions
et la vidéo). Plutôt un répertoire de gestes rehaussés
en nuancier. De gestes précisément dérisoires mais en
geste artistique.
Un geste conçu pour cette composition vidéographique
et inversement, selon un protocole répété. 3x2 affiche
ce processus de trois fois deux images, trois fois deux
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