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Prép’Art  Installations

la porte à d’autres interprétations ou significations  », dit-elle. Elle y parvient par la
sérialité et par des images extrêmement précises et très picturalement soignées. On
peut penser que sa formation de peinture intervient dans ses œuvres par son souci
de l’image et de sa composition à la manière d’un Greenaway, la préciosité en moins.
Du reste, dans une interview donnée à la revue Muse Magazine du Bangkok Post
NewsPaper en 2016, elle commente son travail : « J’aime la couleur, l’apparence de
composition d’une peinture. Mes travaux sont presque de la peinture suspendue au
mur mais avec un peu de mouvement ».
Sur un autre versant de l’œuvre – le versant performatif –, si son corps est le seul
présent dans ses vidéos, c’est qu’il se fait objet : elle aime à dire qu’« elle devient
partie intégrante des outils, du dispositif »... « en se faisant objet, son corps devient
sculpture », ajoute-t-elle.

Traverse Vidéo a projeté sur cinq écrans à l’école Prép’Art : The Scale, The Scale 2,
The Scale of Justice, The Carrying Pole, The Lift.

Quatre d’entre elles font série  : elles présentent la même construction
figurative – un corps statique qui résiste au poids d’une charge, celle de plus en plus
lourde d’éléments tombant du plafond, corps isolé sur un fond de couleurs presque
fluo, dans une vidéo de 2min30.

Dans The Scale, elle se tient en position de yoga – la chandelle – le corps renversé
reposant sur son cou, jambes tendues, soutenu par ses mains sur les hanches. Sur
ses pieds, elle supporte un panier en plastique bleu chargé de plusieurs kilogrammes
de morceaux de pastèque. Du plafond en tombent d’autres qui s’ajoutant
rebondissent sur ceux du panier déjà plein et s’écrasent sur le sol ou tombent sur
son visage, impavide. Les couleurs, vives : rouge des pastèques, vert du fond, bleu
du panier lui ont été inspirées, dit-elle, par les produits exposés sur les étagères des
supermarchés, qui « masquent par la vivacité de leur emballage tout le travail, la sueur
qu’il y a derrière ».

Dans The Scale 2, elle pend, bras à l’horizontale
sur chacun desquels elle tient, mains gantées
de jaune, un panier d’abord vide qui se remplit
de riz déversé depuis le plafond. Le riz tombe
en torrent sur chaque panier ricochant sur le
visage de Kawita, impassible, les yeux fermés
mais on se doute que l’expérience est pénible :
sur chaque panier se déversent plusieurs kilos de riz qu’elle doit tenir à bout de bras.
Les couleurs sont calculées : riz blanc, gants jaunes, fond vert un peu criard. Elle
reconnaît que « c’est très violent ».

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