Page 85 - Catalogue_Traverse Vidéo_2018
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Cinéma UGC Projections
une chorégraphie funambulesque. Cet essai visuel investit l’idée d’une image-miroir,
au travers d’une image granuleuse, écho de notre perception dans la pénombre ; il
explore diverses approches dans sa construction temporelle et spatiale ce qui entraîne
une possible résistance animiste et spéculative contre le rationalisme. Entre fable
et documentaire, frôlant la tautologie spéculative, SiO2 reconstruit de nouvelles
narrations venant de ce qui n’est pas là. En réorientant ainsi vers d’autres formes
d’enchantement, vers des alternatives au système de croyance qui soutient le
sentiment de la réalité, elle questionne nos relations individuelles et collectives avec
la réalité, extrayant le fictif du sable ou d’un présent complètement éreinté et tendu.
Traduire une terre, plutôt que de la raconter. Traduire le sable, plutôt que de le faire
signifier. Ainsi rendre le pouvoir de création à celui qui regarde grâce à la pluralité des
lectures. Je considère ce travail comme antidote à la narration à sens unique.
Charles-André Coderre, Granular Film-Beirut
6min11 | Vidéographe, Canada
La vision du film induit des échos de
gestuelles artistiques, de celles qui
transforment un premier support,
de celles dont la forme en -ing
retiennent le faire tout autant que la
résultante, du type « movie painting »
sur le modèle de l’action painting.
Le champ se fait et se défait au-
delà de traces perdues et devenues
tout aussitôt mémorielles d’une ville du sud avec palmiers, ciel bleu, architectures
géométriques avec terrasses que la musique arabe et surtout le titre Granular Film-
Beirut localisent plus précisément. Des bruits sourds fréquents, auxquels se lient le
topique passage de la pellicule et des accords de guitare ou la corne d’un paquebot,
dessinent un premier paysage. Y répond tout aussi hétérogène un second paysage
d’immeubles modernes avec terrasses, avec murs porteurs d’enseigne d’hôtels ou
de plaques de nom de rue, enchevêtrement de poutres de toiture, ferronneries, grue
de construction. Tous embrassés par un mouvement constant dépassant la ville pour
le plan d’ensemble de la colline calme, y revenant pour le clocher d’église et la grande
roue réitérés, la mer retrouvée avec pour l’atteindre les escaliers mouillés, pour s’en
protéger la jetée de béton et plus au large, en grands flots et vagues tumultueuses.
Jamais de plan arrêté, le flux du film apporte et emporte les bribes mémorielles,
poussée chacune aussitôt par le nouveau souvenir ; il se fait image de ce travail qui
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