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Chapelle des Carmélites     Installations

                             Il fait ce qu’il est. Il est sensation qui danse.
                             Sur le volet symétrique et sur un identique fond noir, une pâte à pain lève, paraissant
                             immense quand les mouvements de recul du danseur rapetissent celui-là… jamais
                             d’autre lien que cette proxémie. Pas de phylactère, pas de bandeau explicitant les
                             rapports, seule se suggère la métaphore de la vie, de la création par cette montée en
                             puissance de la nourriture et seul le titre pose une piste.

crédit photo : Anthoniy Val  irrémédiablement ensemble.  Les corps du retable – volets ouverts –
                                                         puisent à cette force ; les corps nus aux
                                                         clartés diffusées ne forment qu’une
                                                         masse comme en fusion, dont la
                                                         luminosité s’empare du noir ambiant.
                                                         L’ensemble ne suffit pas à écraser
                                                         leurs différences – longues chevelures
                                                         blonde ou brune, homme, femme  –
                                                         … ni leur pouvoir et il fait signe vers
                                                         un magma volcanique, plein de force
                                                         et de fureur. Venant et repartant,
                                                         apparaissant, disparaissant, ces corps
                                                         se font l’image de l’humain qui se
                                                         doit d’agir, de faire lumière. Ils sont

                             Ils ont à faire et à refaire car l’immobile est signe de mort  – même la boule de
                             pain frémit. La menace surveille, constante ; dans les panneaux du haut, une autre
                             étrange activité celle d’un homme  – légiste, aux vêtements de protection avec
                             masque – s’affaire auprès d’une jeune fille – que le champ résume à la tête, chevelure
                             brune mouvante sous un souffle d’air et aux pieds nus – cadavre à autopsier – posée
                             sur une table de métal ou passée à travers un improbable tapis à laver la vaisselle.

                             Le danseur du panneau central, lui, est irrémédiablement seul. Il se lave
                             s’éclaboussant mais sans que s’explicite la nature de sa tâche, il se bouscule de lui-
                             même à lui-même, se cogne contre la paroi de carrelage, se tord au sol, se relève
                             exténué ; nul besoin d’un Dieu pour se poser la question de ce que l’on est/fait.
                             Il faut déambuler même en sur-place. Se dresser, se faire face. Il faut résister à la
                             pression.
                             Ainsi le retable fermé, libère-t-il, en son pinacle, l’image d’un homme en
                             suspension – un Christ allongé mais à l’envers et sans indices de religieux, un simple
                             homme contraint  – et seulement/dangereusement accroché par son vêtement  ;
                             immobile sans pratiquement pas de gestes si ce n’est un léger mouvement de la tête,
                             il supporte cette tension.

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