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Installations Chapelle des Carmélites
Il en garde les points de structuration dans la distinction des formats : le tableau crédit photo Anthoniy Val
central/la caisse réclame deux écrans de 165 cm en diagonale alors que, de part
et d’autre, les deux panneaux en symétrie se cantonnent à un seul 165 cm chacun,
de même que leur verso les recouvrant en version fermée du retable, tous placés
à la verticale alors qu’au registre supérieur, les écrans plus petits sont situés à
l’horizontale.
Il s’en évade par l’implication du hors-cadre qui devient lieu épiphanique de l’image.
Le retable fermé/ouvert gardien de ses images est débordé par la potentialité
interactive qui fait surgir, hors de sa délimitation, un corps autre. L’œuvre invente
les conditions de sa visibilité, elle invente sa propre pertinence.
De la peinture qu’il y inscrit, le retable originel reprend
la force de la surface en l’orientant vers le bas, le haut
et la droite, la gauche vers le centre et ce, sans creuser
une perspective, la platitude du support l’emporte sur
l’illusion de la profondeur ; la composition est en plans
horizontaux et verticaux plutôt qu’en profondeur.
Ce retable gère ainsi une organisation générale du
plan : ce sont cinq espaces distincts dont certains, sans
fond autre que le noir, suggèrent un hors-lieu quand
les autres ne profitent pas de la profondeur de champ
photographique pour décider de l’usage du lieu puisque
s’y mêlent indices de cuisine et indices de morgue en
étrange écho – non localisation partagée par les deux
espaces supérieurs aux plans plus rapprochés jusqu’au
gros plan d’une chevelure féminine.
Le lieu est plus connotatif que délimitant une fonction
sociale.
Le sens de la lecture ou la hiérarchie des zones sont perturbés par l’attirance causée
par le bruit de chute de corps féminins – un ou deux – et de leur respiration, au
pan de gauche, gagnant par là, sur le silence du côté droit. Il le sont aussi par la
remontée des corps ensemble, liés, emmêlés, revenus du hors-cadre pour atteindre
le haut qu’ils quittent en une circulation hors retable. Paradoxe encore que ce
débordement dans cette réplique de l’objet retable circonscrivant.
Plus encore, le silence iconique inopiné induit une étrange attente, il n’est pas soupir
de partition, il est obscurité face à l’image et notre désir d’elle nous retient là avec la
masse sculpturale. Loin d’une lecture fermée et programmatique, celle du retable
est rhizomique.
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