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Des réalisateurs...

                Mêlant image et texte, Elodie Tamayo. et Orsten Groom fondent Les Ballets Russes, une
     interface d’anthropologues de l’inutile dont le slogan est “en histoire comme en littérature, presque rien
     n’arrive.” Le programme Jodie Foster :

                                       Genèse, 3', 2012, France
                                       La litanie des verbes au commencement de la création. Une salle de fête
                                       vide où pendouillent des ballons.
                                       “ Dieu dit, Dieu appela, Dieu vit, puis Dieu dit et Dieu vit. Dieu dit, Dieu fit et
                                       fit aussi, Dieu plaça pour dominer et séparer, puis, Dieu vit. Dieu dit, Dieu
                                       créa et créa aussi, Dieu vit et il bénit en disant.”

                                       Sybille, 3'40, 2012, France
                                       Un film de famille pris dans l’utopique turpitude des parties de campagne
                                       hitlériennes.
                                       “ La Sybille n’a jamais menti ; elle ne s’est jamais trompée.”

                                       Déluge, 2'13, 2012, France
                                       Un chargement vidéo défectueux fait tressauter deux pimbêches de Soap
                                       opera tandis que s’égrène sur leur visage une version lacunaire de la
                                       Genèse 7.14.
                                       “Dieu fit disparaître tous les êtres qui étaient à la surface du sol”.

     Elodie Tamayo : On avait donc une batterie de textes et en contre-champ visuel, un arsenal de vidéos
     Youtube, issues de notre passion pour des sous-genres comme les perçages de kystes, les vidéos
     d'entrepreneurs ou les naissances sauvages de biquettes.

     Orsten Groom : On s'est mis à agglutiner les matières pour voir comment elles se démerdent, et on s'est
     vite rendu compte que certaines associations relevaient de la pure magie: une pertinence doublée d'une
     aisance incroyable. Quand c'est juste c'est juste (comme dit Florence Foster Jenkins ).
     On a fini par réaliser que les vidéos entretiennent des rapports secrets entre elles, des motifs, des
     espèces de personnages récurrents. L'écriture et l'architecture qui sous-tendent tout ça, se sont révélées
     au moment de l'assemblage : on avait accouché d'un programme monstrueux de précision rythmique et
     narrative. Le travail a consisté en dernière instance à mettre en scène et en valeur cette écriture et notre
     blaze que la dernière phrase du programme assène: “Les ballets russes nous ont appris que en histoire
     comme en littérature, presque rien n'arrive”, ce qui est la vérité.

     E.T : Nos Ballets sont, en effet, un programme dépréciatif et pourtant lyrique d'un état de la création
     relativement foireux. Il y a une corrélation entre l'écriture des images, à partir du found-footage, et l'écritu-
     re en surtitrage, qui vient elle aussi d'une méthode de ponction de phases pré-existantes. Ce sont deux
     écritures excitées et générées par les interfaces démentielles que sont Youtube et Google.

     O.G : Le texte est appréhendé comme un pan de l'image autonome. Ses occurrences et ses disparitions
     sont minutieusement organisées pour prendre le relais de l'action en l'informant, ou pour se charger de ce
     qui s'y passe à son bénéfice, un peu comme les bestioles sur les hippopotames ou Mike Love dans les
     Beach Boys. Cet élément rythmique fait à la fois groover l'image globale et la lecture qui la picore.

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