Page 66 - catalogue_2013
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Traverse continue...
Sandrine DEUMIER, Gélule-love, 1', 2011, France
“Utilisant la matière du mot comme image et l’image
comme vecteur du mot, j’utilise le médium vidéo et la
poésie sonore pour exprimer une forme de matière
inconsciente du soi.
Le processus du conte est un vecteur de transgressions
sous couvert de l’imaginaire. Mon travail est essentiellement axé sur le vidéo-poème, la poésie sonore, la
performance poétique et l’installation in situ. J’emprunte le processus du conte comme initiateur de fictions
et approche du réel. Je retiens la matière mobile de l’image comme un reflux textuel sous-jacent.
Mêlant dessins de fiction et poésie sonore, sculptures, et mises en espace dans des installations in situ
aux confluences du percept et d’une approche sensible du mot, mon travail questionne le processus d’une
poésie sonore à l’œuvre dans l’installation.
Entre espaces de consciences et espaces corporels, ce serait comme des espaces sensibles qu’il y aurait
à redéfinir, une sorte d’approche poétique des espaces corporels. Je cherche à redéfinir des zones
pré-sensibles – et de sensations, dans des limites adjacentes aux zones de hors-consciences. Je cherche
des zones de consciences où tout serait à redéfinir.”
Gélule-love, ce pourrait être le nom d’un site érotique or c’est un lieu / non-lieu. Un fond blanc où
entrent en jeu des dessins de très jeune femme, au singulier car la même figure se réplique. Ce n’est ni
une suite, ni une conjonction, mais un espace virtuel sans profondeur ni distinction, et si une table
supporte un appareil à mixer les aliments, elle n’implique rien d’autre. Si certains gestes sont motivés, ils
restent indépendants des autres, la proximité n’est que celle de leur visualisation.
Ces gestes portent la brutalité mais sans mimique, ni rapidité appropriées, bien plus ils
réunissent des incompatibles, une kalachnikov sous un bras, un ourson en peluche sous l’autre. L’arme
peut rester seule, ou être pointée… vers le rien ; en revanche, l’enfance est éminemment meurtrie par le
sacrifice du jouet, démembré, placé dans le hachoir et avalé. La métonymie de la douceur est détruite.
Une voix dirige et décide de ce monde, elle-même plane dans un même entre-deux : la douceur
par la tessiture et la tonalité et la cruauté par le poème susurré et la modulation d’enregistrement électro-
nique : “des armées dans des champs de fleurs volcaniques, des tanks en chantier dans des ravalateurs
de lumière”.
Les enfants se disent tout bas des contes de peur pour échapper à leur peur, ils disent la menace pour la
dérouter… cette gélule pourra-t-elle suffire à éloigner ces violences toujours frémissantes de nos sociétés,
l’écouter encore et encore, du mois, pour calmer cette angoisse.
Simone Dompeyre
Barbara FRIEDMAN & Gilivanka KEDZIOR, [Semaphore], 2'54, 2012,
France
“Parfois, lorsque partout alentour l’obscurité étouffe les derniers souffles par
sa densité, viennent à nous des images. Visions fugaces qui se jouent de
notre raison, comme autant de balises isolées, signaux énigmatiques
révélateurs d’un autre espace-temps, perdu, oublié, occulté. Troublées par
la mascarade des souvenirs-écrans, des voix s’élèvent ; des échanges
familiaux et familiers reprennent leur place, un instant, soulignant l’évidence des non-dits.
J’avais pourtant effacé les traces de cette autre histoire.”
66 Cinéma expérimental, art vidéo, monobandes - Histoire(s)