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Cinéma Le Cratère  Projections

de dissoudre le bouclier  au bénéfice d’un arrière-plan rose d’où émerge une main
tendant un morceau de corail décoloré, vers un homme armé du même bouclier au
milieu cette fois à Picadilly Circus et parmi les passants.

ii:seeing/voyant. Dans le plan deux hommes, portant tous deux un anorak en nylon
vert transparent.

                                                               Face à face l’homme à l’anorak vert,
                                                               de dos, dont on voit le nylon flotter
                                                               sous le vent – est-ce Buchanan
                                                               porteur de la cause écologiste ? –
                                                               et  l’homme au masque et au
                                                               bouclier, auquel le premier présente
                                                               le morceau de corail. Quelle lecture
faire de cette rencontre : celle des adeptes de la liberté avant tout, arborant les lunettes
du Maître à penser, Buchanan à qui on présente le « déficit écologique » sous forme
de morceau de corail décoloré ? Que symbolise le bouclier ? La liberté individuelle
brandie inconditionnellement ? Complique l’interprétation l’annonce par Michael
Davies de la seule présence de « Frankestein-Buchanan-homme-au-masque ».

Ce masque en carton recourbé, du type de ceux que bricolent les enfants, est orné
de différents motifs dont les lunettes de Buchanan. L’homme a pour chevelure, une
sorte de nid d’oiseau, pour vêtement, le même anorak vert nylon transparent, ce
qui perturbe la logique qui s’esquissait jusque-là : pourquoi ce face-à-face si les deux
partagent la même cause qu’exhibe l’adoption du même vêtement vert écologiste ?

L’homme au masque, comme en une hésitation, dodeline un instant de la tête, avant
qu’elle ne soit masquée par le bouclier, tournant lentement, puis finissant par envahir
tout l’écran, sous le retour d’accords de guitare. Le plan devient fixe sur le morceau de
corail desséché abandonné au sol – un astérisque le désigne –, parmi les passants,
indifférents, si ce n’est l’un d’eux qui, étonné, le pousse du pied, sous les paroles
des passants en off. Est-ce une métaphore de l’individualisme ancré dans les modes
de vie (occidentaux) ? Aussitôt et brièvement, le fond marin puis le corail, cette fois
sur un sol en terre au milieu de l’herbe sèche coupée. Le plan revient d’abord sur
un regard à travers des lunettes puis sur l’homme anorak (si c’est le même, il serait
alors sans masque) aux mains en triangle, un instant vides, et tout à coup, comblées
par le morceau de corail. En off, la voix de Buchanan énonce « peut-être devrais-je
dire… » (est-ce l’indice d’une réserve, d’un recul ?), alors que les lunettes – réitérées –
deviennent le lieu de l’éblouissement par l’irisation d’un de ses verres. Une horloge
de ville passe rapidement dans le champ (du temps a passé ?) et le plan s’ouvre
sur un homme portant un masque mais vêtu de l’anorak, aux mains toujours en

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