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Installations Chapelle des Carmélites
Au-delà de ces bribes qui ne visent pas un savoir, c’est un geste de vivacité de la
lettre. Or celle-ci est provoquée par l’AR, qui incruste de façon réaliste des objets
virtuels/les lettres et les mots dans la page existante ; elle superpose l’image virtuelle
à l’image filmée de la page. Ces mots, ces lettres tremblent, sautent, en taille diverse,
en orientation diverse, ils peuvent rester un peu plus longtemps, en un nouveau
« coup de dés (qui) jamais n’abolira le hasard ». Ce poème, que Mallarmé publie
en 1897, annexe onze doubles pages, travaillant la variété typographique, la taille,
la romaine ou l’italique, la majuscule et la minuscule hors les règles communes. Le
poète composa une note, note que le hasard rend propice comme propédeutique
pour approcher Geniza A.R.P.P.O.V., alors même que le dessein est si éloigné.
« L’avantage, si j’ai droit à le dire, littéraire, de cette distance copiée qui mentalement
sépare des groupes de mots ou les mots entre eux, semble d’accélérer tantôt et de
ralentir le mouvement, le scandant, l’intimant même selon une vision simultanée de
la Page. »
Si le coup de dés n’abolit pas le hasard, la poétique provoquée par la traduction AR
de Google dont, par ailleurs, le néophyte ne peut vérifier la justesse, saisit des mots et
nous saisit hypnotisés par ce qui a lieu et qui a lieu sur ces textes que l’on ne voulait
pas détruire.
Simone Dompeyre
François Talairach, eau salée
48min59 | Toulouse, France
D’où vient que l’on rie si aisément et que l’on ait
honte de pleurer publiquement ?
Cette fausse question n’est pas nouvelle,
en y précisant « au théâtre », on rejoint de longs
débats du xviie siècle1 et la préfiguration de la
re-connaissance du xviiie des pleurs comme
expression de la sensibilité qui fait de nous des
humains.
À suivre ainsi l’Histoire des mœurs, on saisit la distinction des statuts et des fonctions
du rire et des pleurs ; la peine muette, les pleurs aux enterrements, les pleurs aux
1 « D’où vient que l’on rit si librement au théâtre, et que l’on a honte d’y pleurer ? Est-ce moins dans la
nature de s’attendrir sur le pitoyable que d’éclater sur le ridicule ? […] Le mauvais ris dont on veut les
couvrir prouve clairement que l’effet naturel du grand tragique serait de pleurer tous franchement et de
concert à la vue l’un de l’autre, et sans autre embarras que d’essuyer ses larmes. », Jean de La Bruyère,
Les Caractères, Des Ouvrages de l’esprit.
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