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Projections Cinéma Le Cratère
Lisi Prada, Simone Weil. Dans le coin sombre
3min14 | Espagne
Un être humain a une racine par sa participation réelle, active et naturelle
à l’existence d’une collectivité qui conserve vivants certains trésors du
passé et certains pressentiments d’avenir.
Simone Weil
À Londres où elle était engagée dans la France
Libre, Simone Weil rédige L’Enracinement,
prélude à une déclaration des devoirs envers
l’être humain entre janvier et avril 1943, à la
demande du Général de Gaulle qui désirait
une nouvelle Déclaration des Droits de l’Homme,
pour la France libérée. L’ouvrage publié
post-mortem distingue trois pistes réflexives
fondamentales de sa pensée : Les besoins de
l’âme, Le Déracinement et L’Enracinement.
Elle y argumente que la notion de droit est subordonnée à celle de l’obligation, que
le droit naît de l’obligation, ce pourquoi la loi des hommes doit procéder des devoirs
pour faire exister les droits et ce, parce que l’universalité est en chaque être humain.
« Il y a hors de cet univers, au-delà de ce que les facultés humaines peuvent saisir,
une réalité à laquelle correspond dans le cœur humain l’exigence de bien total qui
se trouve en tout homme. » Elle croit en l’âme dont elle dresse une liste de quatorze
besoins – ordre, liberté, obéissance, responsabilité, égalité mais aussi hiérarchie,
honneur et châtiment, sécurité et risque, propriété privée et propriété collective,
liberté d’opinion et vérité à satisfaire sans quoi à l’instar d’un corps non nourri, elle
subit « un état plus ou moins analogue à la mort ».
La troisième partie qui donne le titre à l’ouvrage, L’Enracinement réfléchit aux
nécessités à suivre pour une réintégration harmonieuse de l’homme dans la société ;
elle y intègre l’apprentissage de « l’esprit de vérité, de justice et d’amour » et
l’initiation à l’art médiéval, chant grégorien comme poésie liturgique et à l’art grec.
Lisi Prada ouvre le champ vidéo aux interrogations et au mode d’être de Simone
Weil qui, adaptant sa vie à ses idées, abandonne sa carrière d’enseignante agrégée
pour le montage à la chaîne chez Alstom ou chez Renault, qui s’engage pendant
la guerre d’Espagne contre Franco et dans la France Libre qu’elle quitte en juillet
1943 pour partager les conditions de vie du pays en guerre, malgré sa mauvaise
santé. La tuberculose l’emporte en août 1943.
Un plan fixe excède le gros plan puisque ni le haut du front, ni le bas du menton
ne s’inscrivent dans le champ et pas davantage la coiffure courte dont le volume
entoure en halo, ce visage en axe frontal, à la bouche bien dessinée et close et au
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