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Projections Cinéma Le Cratère
Virginie Foloppe, Le coffre à jouets de J. F. / Le coffre à jouets de Jacques Foloppe
5min47 / 4min07 | France
Poursuivant sa recherche autour de la mise à mort
de l’enfance, V. Foloppe invente dans Le coffre à jouets
de J. F. un dispositif dont le ludisme rivalise avec le
tragique. Une femme est assise à une table recouverte
d’un drapé blanc. Elle ouvre une boîte, y glisse une
main vigilante et s’empare du corps oublié d’une
poupée. Elle l’installe, en équilibre, sur le rebord du
coffret, alors qu’une mélodie, déjà, qui émane de
l’intérieur, évoque les premières notes d’une danse
nocturne.
La découverte de ce mannequin de l’enfance inquiète : cette petite malle, qui
conserve, semble-t-il, les reliques d’une personne disparue, rappelle, sans conteste,
ces agrégats d’objets disparates exposés par Christian Boltanski, comme une
manière de redessiner le visage d’une absence, laissée secrète, et d’imaginer les
raisons d’un départ virulent. Le titre, proposé par V. Foloppe, paraît, par ailleurs
rendre hommage au travail de cet artiste, puisqu’il reprend cette manière d’exposer
« un objet ayant appartenu à... ».
À l’intérieur de ce coffre à jouets, qui redessine un
nouveau drame, un miroir, disposé sous le couvercle,
renseigne sur la nature de ce retour vers l’enfance.
Bien qu’il redouble le visage féminin, instaurant
une distance de l’identité avec elle-même et facilite
de violentes dépersonnalisations, l’ouverture de ce
coffre à jeux, métaphore sans doute de l’accession
au « Je » selon Winnicott, reviendrait finalement à
traverser le miroir, à s’engager derrière la profondeur
du leurre : qu’y a-t-il, en somme, de l’autre côté
de la surface miroitante de l’enfance ? Qu’en est-il des secrets enfouis, enterrés,
décomposés, acerbes ? Considérer le drame des premiers temps de la vie à travers
le scénario d’une Vanité intrigue, encore davantage : car, ne pourrait-il s’agir de son
propre corps défunt, inerte, que cette femme découvrirait à l’intérieur d’un coffret
à bijoux ? À moins que ce ne soit le message d’une sœur décédée, à la manière de
Festen réalisé par Thomas Vinterberg, en 1998, dont V. Foloppe aime à rappeler
la référence directe, et qui indiquerait, sous la manière d’un jeu, les raisons d’une
mort oubliée ? Dans cette dernière perspective, le corps de la pupille joue de la
métaphore d’un fantôme familial, que l’on doit oublier, soit anéantir une seconde
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