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Installations Quai des Savoirs
archéologie des appareils photographiques parce que le mouvement continu lie la
machine au sujet photographié. L’objectif toujours lié à ce qu’il vise. La machine
avec ce pour quoi elle a été acquise, en lointain héritage de la nécessité énoncée
par Nadar « jamais je n’accepterai de l’objectif qu’il ne rende pas ce qu’il voit »…
l’humain est premier, le studio se fait l’espace de sa trace ; sans nostalgie, les visages
portent leur présent qui rejoint le présent de notre regard.
Le temps n’est pas historique quoique chargé des temps passés comme l’atmosphère
se charge des odeurs d’un lieu.
La musique n’est pas davantage pittoresque, elle ne scénarise pas plus qu’elle ne
localise ; en phrasés brefs souvent réitérés, elle participe à la déambulation visuelle
en lancements sourds et accents prolongés osant ici et là quelques pointes, ou
des accents prolongés d’une clarinette voilée, parfois la connotation des éléments
primordiaux et souvent le brumeux de la partance. Chercher l’humain sous l’image
des humains en chorus sans éclatements.
Certes des marqueurs de période rappellent la fonction mémorielle de la
photographie ; elle garde du « ça a été ». Et celui-là est tributaire précisément de
son temps.
Toutes les photographies sont enchâssées dans le studio actuel, toujours le même
puisque la circularité ne fait pas état de changement de pratique autrement que
par le changement interne des photographies allant de la pose très codée jusqu’à la
spontanéité (qui n’échappe pas toujours au code).
Les fonds des premières dénotent le studio avant que les photos de la famille ne se
prennent en famille, en amateur, à l’extérieur ou dans les appartements privés et
maisons de vacances ou exceptionnellement posées en « nu de studio ».
Les premières images découvertes signalent la pose qui imposait une attitude
particulière et l’objet sur lequel reposer le corps quand le costume en lui-même
contraint le corps fort couvert alors que les dernières images respirent la libération
des mœurs, la complicité et l’affection. Chantal DuPont y sourit seule, en couple, en
groupe… non pas comme l’artiste mais comme l’amie.
Suivant les changements de formats et de formes ovales ou rectangulaires, avec
fond blanc à la Nadar ou devant décor, puis devant les meubles personnels, à leur
insu se suggèrent des changements sociologiques. Au-delà des indices de contraintes
techniques, ce sont les habitus sociaux qui s’immiscent.
Les photographies ne s’alourdissent pas de points indiscrets mais dessinent les
manières d’être et subrepticement les changements des mœurs ; cela sans désignation
des pays d’origine autres que tel rare patronyme ou toponyme et une seule indication
du mois de juillet en langue française. L’artiste a collecté les images de famille, celles
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